Littérature étrangère

George Orwell

Oeuvres

  • George Orwell
    Textes traduits, présentés et annotés par Véronique Béghain, Marc Chénetier, Philippe Jaworski et Patrice Repusseau
    Gallimard
    08/10/2020
    1664 p., 66 €
  • Chronique de Aurélie Janssens
    Librairie Page et Plume (Limoges)
  • Lu & conseillé par
    29 libraire(s)
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Chronique de Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Alors que le sens du monde nous échappe, il est plus que jamais nécessaire de faire un pas de côté pour observer, comprendre, se donner les armes pour agir, prendre conscience de nos libertés et se battre pour les préserver. Vos libraires sont là pour vous fournir des munitions de choix : les livres ! Et le modèle Orwell est dans ce domaine l'un des meilleurs !

« Toute littérature est politique, et toute politique est mensonge et propagande », dans la pensée d'Orwell, nous annonce, dès la première phrase de sa préface de l'édition de la Pléiade, Philippe Jaworski, professeur émérite de littérature américaine à l'université Paris-Diderot. Il rappelle à quel point l'écrivain n'a eu de cesse, dans ses essais comme dans ses romans, de dénoncer la « politique » comme figure de l'oppression et du crime (autoritarisme, cruauté, mépris de classe, colonialisme…). Une politique qui « n'organise pas la Cité en vue d'améliorer le sort des humains, mais s'emploie à dresser et à endoctriner des esprits, à soumettre des sujets, à imposer le pouvoir d'un dogme ». Et par « politique », Orwell ne désigne pas que ses représentants, les dirigeants, mais bel et bien tous ceux qui exercent un pouvoir quelconque, notamment les intellectuels et les médias. À ce « collectivisme oligarchique », l'écrivain oppose le common decency, le bon sens contre les injustices, et souhaite que l'humain, l'individu autonome, l'esprit libre soit remis au cœur de la société et du pouvoir. Ces ambitions, il les traduit par des textes forts. Il s’inscrit ainsi dans une tradition de pamphlétaires qui croient encore en la puissance du verbe pour amener le lecteur à réagir. Et si la postérité a surtout retenu La Ferme des Animaux et 1984, Philippe Jaworski rappelle, par le choix des œuvres présentes dans ce volume, que ces deux romans ne peuvent se comprendre pleinement que par les essais qui les ont précédés et annoncent chacun à leur manière ces deux « allégories ». Pour la présente édition, chaque texte a été retraduit pour mettre en avant le style « vif et rugueux », « clair » et « efficace » de l'auteur. Afin de mieux apprécier la puissance de son style et des images qu'il convoque, les éditions Grasset ont confié l'adaptation graphique de 1984 à Fido Nesti. Cet artiste brésilien avait d'ailleurs découvert ce texte qui l'avait fortement marqué en classe et, surtout, en 1984 ! Dans cette adaptation, basée sur la précédente traduction chez Gallimard de Josée Kamoun, l'artiste nous plonge dans cette dystopie glaçante, ce monde totalitaire où les libertés, comme les couleurs, semblent avoir disparu, un monde effrayant en gris et rouge où la violence des slogans du Parti et la figure de Big Brother surgissent des cases pour mieux secouer le lecteur. Deux ouvrages, deux variations autour d'une œuvre majeure, toujours aussi nécessaire pour réveiller les consciences et se battre pour la liberté de penser.

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