Beaux livres

Itadakimasu*

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Par Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Vous êtes amateur de cuisine asiatique mais la tristesse d'un buffet à volonté ou le manque de saveur des sushis livrés à toute heure et préparés par on ne sait qui vous désespèrent ? Heureusement, de plus en plus de chefs et de fins gourmets ont décidé de nous faire partager leur culture culinaire et découvrir des saveurs nouvelles. Direction le Japon et la Corée !

Nouveau venu dans la collection « Le banquet » dirigée par Ryôko Sekiguchi (une collection d’œuvres japonaises inédites où la nourriture occupe une place centrale pour parler d'une culture et de sa complexité), Les Carnets de table d'un amateur de cuisine japonaise d'Arashiyama Kôzaburô nous propose un voyage original à travers la gastronomie japonaise. L'ouvrage est préfacé par l'auteur de bande dessinée Guillaume Long qui confesse volontiers n'avoir jamais fait de préface ni mis un pied au Japon. Il nous indique néanmoins que ce qu'on va lire est « un livre qui parle de gastronomie mais aussi du Japon, des gens, de l'alcool, des cacahuètes, bref, de la vie ! ». Et c'est effectivement ce que nous trouverons dans cet ouvrage joyeux et hétéroclite qui rassemble des notes parlant tour à tour de racines de lotus, de ce que mange un lapin, de l'art de manger froid, de la soupe miso, d'edamame et de manjû, de ce que l'on peut consommer lors d'une veillée funèbre, de l'effet que l'alcool a sur notre humeur ou encore de la place de la nourriture dans les haïkus. Bien loin des clichés, ces souvenirs et remarques épicuriennes, ponctués de conseils culinaires et de recettes personnelles, nous font découvrir un nouvel aspect de la culture nipponne.

« Je suis venue au Japon pour sa cuisine, j'y suis restée par amour. » Voilà ce que nous confie Nancy Singleton Hachisu dans Japon, La cuisine à la ferme. Cette Californienne est partie au Japon pour découvrir la cuisine traditionnelle japonaise et y a rencontré son mari, Tadaaki, un agriculteur japonais. Elle s'est installée dans sa ferme familiale où plusieurs générations vivent sous le même toit et s'est immergée dans cette vie paysanne rythmée par les saisons. Une vie simple correspondant parfaitement à son engagement pour le slow food, l'écogastronomie et l'alterconsommation, autant d’invitations à mieux écouter et respecter le vivant qui nous nourrit. Dans cet ouvrage, le lecteur est plongé dans cette vie à la ferme, on y découvre les membres de la famille, les moments qui rythment l'année, les fêtes traditionnelles mais aussi la cuisine, bien entendu, et l'artisanat. Car comment cuisiner sans avoir les bons ustensiles ? Nancy Singleton Hachisu nous encourage à retrouver notre instinct, à écouter notre corps, la nature, à se sentir chez soi dans sa cuisine, à prendre le temps de respecter les produits que l'on consomme. Elle nous donne les bases de cette cuisine simple : les outils et ustensiles à avoir chez soi, les produits que l'on peut aujourd'hui trouver dans de nombreuses épiceries asiatiques et les conseils pour bien les choisir, des techniques de cuisson et de coupe des aliments. L'ouvrage fait la part belle aux recettes : des tsumami (ou amuse-bouches) aux desserts (même si au Japon on ne consomme pas de dessert sucré en fin de repas : les gâteaux et glaces proposés se consomment plutôt en en-cas ou à l'heure du thé), en passant par les soupes, le soja, le riz, les légumes, les viandes et produits de la mer, vous aurez tout ce qu'il faut pour découvrir la « vraie » cuisine japonaise !

Et s'il est une cuisine que l'on connaît encore moins que la cuisine japonaise en Occident, c'est bien la cuisine coréenne. Pour y remédier, Luna Kyung, une Coréenne installée en France, aidée de l'illustratrice Ahnji, nous propose Corée gourmande, Voyage culinaire au pays du matin calme. Elles nous font découvrir les richesses de cette gastronomie qui tient d'abord à la diversité de l'environnement en Corée. En effet, cette île profite aussi bien des aliments issus de la mer que de ceux d'une terre riche, notamment grâce à la présence de montagnes. Longtemps liée à la spiritualité et à la religion, la cuisine coréenne est encore imprégnée d’une manière de consommer des aliments relevant du mysticisme. Le chamanisme coréen a introduit une vision philosophique de la cuisine, le bouddhisme une tradition végétarienne et les échanges avec d'autres peuples nomades d'Asie, les viandes grillées. Se nourrir en Corée a longtemps été lié à une vision thérapeutique, considérant l'alimentation comme un moyen de restaurer autant le corps que l'esprit, un art de vivre en harmonie avec la nature. Et si le XXe siècle, l'urbanisation, les mouvements économiques et politiques ont pu modifier certaines habitudes, les Coréens restent attachés à leurs marchés, leurs restaurants, aux temps d'échange et de partage autour du bansang, le repas quotidien traditionnel composé de riz, d'une soupe et de trois petits plats (banchan) souvent accompagnés de kimchi (des légumes ou condiments fermentés). Culture, traditions, anecdotes, recettes riches et variées, termes culinaires (souvent basés sur les sensations) : cet ouvrage regorge de connaissances transmises avec poésie, philosophie et générosité.

Sortez vos plus belles baguettes, direction les pays du Soleil-Levant et du matin calme pour un voyage dépaysant où tous les sens seront en éveil !

* Merci pour ce repas