Littérature étrangère

Patti Smith

L'Année du singe

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Chronique de Marie-Laure Turoche

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Composé de dix-sept chapitres et trente-cinq photos, le nouveau livre de Patti Smith est une invitation à la poésie, à la mélancolie et au voyage. On se glisse dedans comme dans un rêve étrange.

L’année du singe, c’est celle de 2016, l’année où Donald Trump va être élu, l’année des 70 ans de Patti Smith. Une année chaotique pourrait-on dire, comme l’annonce la citation d’Antonin Artaud en exergue : « Une folie mortelle s’empare du monde ». En tous cas, une année charnière. Patti Smith décide de passer le réveillon du nouvel an dans un motel de Santa Cruz, le Dream Inn. L’occasion pour elle de faire une pause, de laisser vagabonder son esprit et repenser à ses morts : « Les grains se déversent et je remarque que les morts me manquent plus que d’habitude. ». Cette année-là sera aussi celle où elle perdra Sandy Pearlman qui devait d’ailleurs l’accompagner à Santa Cruz. Pour rappel, il est celui qui l’a incitée à créer un groupe de rock dans les années 1970. Patti Smith rend aussi hommage à son ami, l’écrivain Sam Shepard qui souffre de la maladie de Charcot (il décède en 2017). Elle lui rend visite à plusieurs reprises pour l’aider à finir The One Inside. Ses copains de toujours, ses compagnons de route, ils s’appellent aussi Bolaño, Pessoa ou Burroughs. De San Francisco à Lisbonne en passant par le Kentucky, on déambule, on rêve, on médite, on suit une mystérieuse piste de papiers de bonbons sur la plage. On débat avec un certain Ernest de ce qu’aurait pensé Conrad d’Apocalypse Now. Dans tous ses livres, la poétesse a rendu hommage à l’art, à la littérature et à la musique. Elle rappelle lors d’une conférence qu’elle relate ici, à quel point la bibliothèque de son enfance a été salvatrice. Que de beauté dans ce livre°! On célèbre le temps, la perte, la nostalgie mais aussi l’imagination… et la vie toujours ! Elle l’a promis à l’enseigne du Dream Inn, Patti Smith s’envolera pour Uluru, « la capitale mondiale du rêve ».

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