Littérature étrangère

Piedad Bonnett

Ce qui n’a pas de nom

Chronique de Marie-Laure Turoche

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L’écriture est thérapeutique, on le sait. Dans ce court récit, la poétesse colombienne Piedad Bonnett veut tenter de surmonter l’insurmontable: la mort de son fils.

Piedad Bonnett a perdu son fils Daniel alors qu’il n’avait que 28 ans. Cette mort est d’autant plus terrible que Daniel s’est jeté du toit de son immeuble. Il luttait depuis des années contre des démons intérieurs, une maladie dont on préfère taire le nom : la schizophrénie. Raconter Daniel, c’est bien sûr une façon de faire son deuil mais c’est aussi essayer de comprendre sa folie, de l’expliquer et d’une certaine façon, de la dompter. Cette folie aurait été provoquée par ce fameux médicament contre l’acné. En grande poétesse, Piedad Bonnett choisit soigneusement ses mots ; elle sait comment faire passer l’émotion tout en faisant preuve de pudeur et d’élégance. Elle n’hésite pas à convoquer les plus grands écrivains, ceux qui ont utilisé la plume pour apprivoiser la mort ou la folie : Vladimir Nabokov, Raymond Carver, Javier Marías et bien d’autres. Elle reprend cette phrase de Juan José Millas : « L’écriture cautérise les blessures au moment même où elle les ouvre. » Cette citation dit l’essence même de cette entreprise littéraire. Avec ce texte, Piedad Bonnett se fait violence et panse ses blessures. Ce qui n’a pas de nom est un récit qui prouve à lui seul combien la littérature est nécessaire.

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