Essais

Le point sur le féminisme

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Par Marie-Laure Turoche

Les éditions Points ont l’excellente idée de créer leur collection « féministe ». Des livres de fictions et de non-fictions qui se veulent engagés et accessibles à toutes les générations… et tous les portefeuilles ! Pour le lancement, quatre textes vont être publiés dont Sororité, un recueil dirigé par Chloé Delaume.

« Le mot sororité, nous explique Chloé Delaume, vient du latin soror, sœur. C’est un lien spécifique, solidaire, horizontal, indéfectible, entre femmes. Il abolit la rivalité et peut s’avérer être un puissant outil pour lutter contre le système patriarcal. » Pour illustrer ce lien entre les femmes, quoi de plus beau qu’une collaboration exclusivement féminine. Elles sont romancières, réalisatrices, chanteuses, blogueuses, essayistes, journalistes et elles ont toutes répondu présentes. Cela peut paraître un brin naïf de prôner cette solidarité et Lauren Bastide, dans cet essai, montre bien qu’il n’est toujours facile de ne pas dénigrer une femme. De même, la sororité est-elle possible entre « la femme bourgeoise » et « la femme précarisée, primo-arrivante », s’interroge la blogueuse Kiyémis. Pourtant, il serait bon de se défaire de cette rivalité dans laquelle les femmes sont depuis toujours ancrées, jusque dans les chansons populaires. Souvenez-vous de ce tube À cause des garçons que nous avons tous fredonné mais Ovidie nous signifie que ces paroles, écrites par deux hommes, ne sont pas si anodines. Dans l’excellent texte d’Estelle-Sarah Bulle, on voit que les hommes ont depuis toujours cultivé cette même entraide entre eux. La Nouvelle Vague, le RAP, les GAFA… Que ce soit dans l’art comme dans les affaires, on a toujours soigneusement évincé les femmes. Elle conclut brillamment : « Le féminisme, c’est le tronc d’un arbre qui fleurit et porte des fruits incroyables depuis des décennies. […] La sororité, je dirais que c’est la sève de cet arbre. C’est penser aux femmes au quotidien. » Car la sororité fait partie d’un plus grand bastion, celui du féminisme. Dans cette nouvelle collection, on retrouvera bien sûr Le Regard féminin d’Iris Brey, également présente dans l’ouvrage collectif précédemment évoqué. Dans ce texte, Iris Brey développe le concept de female gaze ou comment le regard féminin « nous fait ressentir l’expérience d’un corps féminin à l’écran ». Avec Le Sexe selon Maïa, Maïa Mazaurette bouscule avec humour et intelligence les idées reçues sur la sexualité. Pour finir, l’ouvrage de référence de théorie queer, Testo Junkie de Paul B. Preciado dans lequel il raconte 236 jours d’injection de testostérone. Plus qu’une autofiction, « une fiction autopolitique ou une autothéorie », selon l’auteur. En résumé, des livres non-consensuels, révoltés, oserais-je dire punk, et qui ont pour point commun de renverser l’ordre établi, celui du patriarcat.