Littérature étrangère

Jim Harrison

Wolf

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Chronique de Emmanuelle George

Librairie Gwalarn (Lannion)

Les éditions 10/18 saluent l’anniversaire de la disparition de Jim Harrison en 2016. Ici, focus sur trois de ses grands textes proposés avec des préfaces inédites de François Busnel. L’édition en poche de la nouvelle traduction du recueil Légendes d’automne par Brice Matthieussent est aussi motif à se réjouir.

Où en êtes-vous dans vos lectures de Jim Harrison ? Besoin d’une piqûre de rappel ? Prenez Sorcier, la quatrièmede couverture est alléchante (« Tout à fait lyrique, émouvant et rabelaisien, le sorcier de Jim Harrison fait partie des paumés de génie ») et, sur un bandeau, François Busnel, l’un de ses grands fans, clame son enthousiasme et salue « une énergie qui explose à chaque page ». Manière élégante de dire que ce roman est trash et grinçant ! On y suit les péripéties de Johnny Lundgren, surnommé Sorcier, cadre au chômage, réfugié dans une ferme du Michigan avec sa femme, Diana. Il est grand amateur de bonne chair/chère (la gaudriole et les gueuletons). Un jour, un ami de sa femme lui propose un travail d’enquêteur un brin spécial. Le voilà entraîné dans un périple qui va le mener à travers les États-Unis. Un peu trop corsé et outrancier ? Prenez Wolf : le premier roman du grand Jim et le plus autobiographique, écrit sur les conseils du copain et romancier Thomas McGuane après une chute terrible qui obligea Jim à l’immobilité pendant de longues semaines. Sous-titrée Mémoires fictifs, voici une méditation piquante sur la jeunesse, l’Amérique, la poésie, la nature et les risques de la vie.Ici, on se délecte du récit de Swanson, vagabond littéraire perdu en pleine forêt qui reconstitue par bribes celui qu’il fut, habitué des motels miteux, amateur de vin et de whisky, de jolies serveuses, d’Arthur Miller et d’Arthur Rimbaud. Un goût de trop peu ? Emparez-vous de Légendes d’automne, un recueil de trois longues nouvelles (ou novellas) écrites en 1979 et qui apporteront argent et notoriété à leur auteur. C’est Brice Matthieussent, grand connaisseur de littérature américaine et traducteur de Jim Harrison depuis 1991, qui en propose une nouvelle traduction française. Ici, nature et culture s’entrechoquent et révèlent des pulsions primaires. Ces trois textes « Vengeance », « L’homme qui renonça à son nom », « Légendes d’automne » composent des univers en contrastes. Les hommes y cherchent leur bonheur, tâtonnent, aiment à la folie, se cherchent au bord de la déraison et se vengent avec fracas. Chacun y est en bordure de sa vie, en bordure de sa mort, entre chien et loup, comme l’était Jim Harrison. Seuls le ciel, la forêt et les animaux, les beautés d’un paysage rappellent aux hommes leur place sur terre. Sans avoir l’air d’y toucher, d’une écriture résolument sobre, Jim Harrison nous emporte où il le veut, suivant la danse de la vie.

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