Littérature française

Philippe Grimbert

Un garçon singulier

illustration

Chronique de Isabelle Aurousseau-Couriol

Librairie de Paris (Saint-Étienne)

Le roman de Philippe Grimbert fait partie de ces textes dont on regrette par avance de devoir tourner la dernière page, et que l’on classe sans hésitation dans le registre des pépites ou dans celui des bonbons (selon son goût).

Horville, dans le Calvados, vous connaissez ? Vous ne connaissez pas, mais pour Louis, ce nom inscrit sur la petite annonce affichée dans son université est le symbole de son enfance, de ses vacances familiales, en un mot de ses meilleurs souvenirs. Il s’empresse de mettre la main sur l’auteur de la petite annonce, qui n’est autre que le père d’un « adolescent singulier » dont il faudrait s’occuper. Et c’est le départ pour cette bourgade riche de tant d’émotions. Mais la saison des vacances est loin, et la station balnéaire, si brillante dans l’esprit de Louis, n’est plus que l’ombre de ce qu’elle était dans les années 1970 lorsqu’elle était à la mode. Par ailleurs, qu’attend-t-on de lui ? De quelle sorte d’aide a besoin l’adolescent ? Quand Louis a posé la question, le père du jeune homme est resté évasif… Quant à Hélèna, l’épouse de celui-ci, elle aspire à la tranquillité qui lui permettra d’écrire à nouveau. Il faut donc que quelqu’un s’occupe de Iannis – c’est le nom de cet adolescent blond de 16 ans, dont Louis finit par découvrir le mal : il est autiste. Par petites touches et par le biais de scènes intimistes inscrites dans le quotidien, l’auteur montre la réalité de la vie d’un enfant imprévisible, silencieux, incapable de communication avec autrui. Et pourtant, Iannis semble lire dans les pensées des autres et plus particulièrement dans celles de Louis. Il s’attache à ce nouvel étudiant chargé de veiller sur lui, en même temps qu’il paraît, lui le malade, veiller son protecteur. Iannis le pousse dans ses derniers retranchements et le force à faire resurgir les souvenirs qu’il avait chassés de ses dernières vacances à Horville. La place d’Hélèna au sein de ce duo n’est pas facile. Auteure de romans érotiques, elle manque d’amour ou en déborde. Philippe Grimbert nous fait partager la difficulté de vivre avec ses enfants, explore l’incompréhension qui sépare les membres d’une même famille, s’interroge sur l’impossibilité de rompre les liens, et nous offre une merveilleuse réflexion sur la différence.

 

Les autres chroniques du libraire