Littérature française

Pierre Szalowski

Mais qu’est-ce que tu fais là tout seul ?

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Chronique de Isabelle Aurousseau-Couriol

Librairie de Paris (Saint-Étienne)

Il y a trois ans, vous avez peut-être découvert Pierre Szalowski avec son charmant Le Froid modifie la trajectoire des Poissons. Il fait toujours aussi froid dans son Québec natal, mais il nous revient cette fois-ci avec un conte de Noël.

Nous sommes à Montréal le soir du 24 décembre. Un homme descend d’un taxi et se rend dans un superbe palace. Il s’agit de Martin Ladouceur, grand hockeyeur devant l’Éternel, ex-champion de l’équipe de Montréal sur le point de revenir jouer dans ses rangs après huit ans d’absence. Il s’attend à être reçu comme le Messie et là, surprise, la réception à l’hôtel se montre d’une déplaisante froideur. On ne veut pas lui servir à boire, on lui demande une conduite décente, à lui, la star des patinoires et le boute-en-train des troisièmes mi-temps. Ses parents refusent de lui parler au téléphone, en particulier son père. Son meilleur ami et co-équipier Georges d’Amour ne le laisse pas rentrer chez lui et ne l’invite même pas à sa soirée de réveillon. Il ne veut pas être l’ami de ce joli cœur, il a une famille et une vie rangée. Martin Ladouceur est seul. La prédiction qui lui annonçait qu’il finirait dans la solitude se réalise. Riche mais seul. Une petite balle rouge traîne dans sa chambre. Quand il demande une explication, on se moque, on le fait passer pour fou ! Puis Martin découvre un petit garçon caché dans sa chambre. Pareilles déconvenues finissent par déstabiliser notre héros, que la vie avait plutôt gâté jusqu’à présent. Il ne lui reste pour s’épancher que le chauffeur de taxi. Celui-ci essaye de lui remonter le moral : « Il y a toujours quelque part quelqu’un qui vous aime. » Et pourtant, les choses ne s’arrangent pas. Dans le petit restaurant où Martin avait ses habitudes, Ginette le bat froid. La rencontre avec son ancien manager achève de vaincre ses dernières illusions. Celui-ci le place devant ses responsabilités quand il lui dit : « les filles d’un soir, ben c’est comme une saison au hockey, faut attendre neuf mois pour connaître le résultat final… ».

Ce roman est une vision moderne du Conte de Noël de Charles Dickens. Martin Ladouceur n’est intéressé que par sa « petite » personne. Très bling-bling, il n’alloue pas de temps aux autres et ne s’intéresse pas à ceux qui l’entourent, à leurs aspirations, leurs envies, leurs amours. Les rencontres de l’enfant, de son ancien manager (à l’image des génies dans le roman de Dickens) font progressivement basculer ses certitudes. Si vous avez besoin de tendresse, n’hésitez pas à ouvrir le roman de Pierre Szalowski. Il vous mettra du baume au cœur et, lors du prochain réveillon, n’oubliez pas… tout peut arriver.

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