Littérature étrangère

Ernst Lothar

Mélodie de Vienne

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Chronique de Isabelle Aurousseau-Couriol

Librairie de Paris (Saint-Étienne)

Lecteurs de Stefan Zweig et de Thomas Mann, amateurs ou amoureux de littérature allemande, précipitez-vous sur cette nouvelle traduction de Mélodie de Vienne, une des perles romanesques de la Mitteleuropa.

Comme beaucoup, je ne connaissais pas Ernst Lothar. Contemporain et proche de Zweig, Musil et Joseph Roth, c’est un homme de théâtre dans la Vienne de l’entre-deux-guerres. Il s’exile en 1938 à New York en raison de ses origines juives, et c’est en 1944 qu’il publie ce qui reste comme son œuvre maîtresse, Mélodie de Vienne. Dans un immeuble cossu de la Vienne de la fin du XIXe siècle, vit la famille Alt, dynastie de facteurs de pianos, instruments exceptionnels sur lesquels Mozart aurait joué. Famille de la grande bourgeoisie, elle s’astreint à l’étiquette de la bonne société. Mais le mariage de Franz avec la belle Henriette Stein bouleverse le petit monde de l’immeuble. Elle a reçu une éducation trop libérale aux yeux du reste de la famille. Bien que baptisée, ses origines juives la poursuivent. Au même moment, Vienne pleure la mort de Rodolphe, l’archiduc et héritier de l’Empire. Les régions de l’Empire austro-hongrois réclament leur souveraineté. Les failles du régime habsbourgeois apparaissent. Néanmoins, Vienne est le centre d’une création étourdissante, avec Klimt, Schiele, Mahler et tant d’autres. La vie s’écoule tranquillement dans l’immeuble de « l’ange à la trompette ». Les incartades et relations extra-conjugales d’Henriette font jaser. Les enfants grandissent. Le spectre de la guerre se précise depuis l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand à Sarajevo. Franz et ses fils sont réquisitionnés. Au retour de la guerre, tout aura changé. La république est née, les mouvements ouvriers prennent d’assaut les rues, le nazisme infiltre son poison au sein de la population. Avec Mélodie de Vienne, Ernst Lothar raconte la ville où il a vécu avant son exil. On compare souvent ce roman aux Buddenbrook de Thomas Mann (Le Livre de Poche). Découvrez Lothar et espérons que d’autres ouvrages de cet auteur soient traduits prochainement.

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