Polar

Harlan Coben

Remède mortel

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Chronique de Isabelle Aurousseau-Couriol

Librairie de Paris (Saint-Étienne)

Si le second roman d’Harlan Coben, paru en 1991, est nettement marqué par son époque, il nous permet néanmoins de réfléchir aux évolutions de la société américaine et de la recherche médicale.

Remède mortel s’ouvre sur la découverte du corps sans vie d’un médecin, Bruce Grey, spécialiste du sida et responsable d’une clinique où sont soignés une quarantaine de personnes, toutes atteintes de cette maladie. Le dossier est rapidement classé par la police qui conclut à un suicide. Pourtant, son adjoint, le docteur Harvey Riker, est perplexe et ne croit pas à la version policière. La mort du médecin remet en cause les recherches que menaient les deux spécialistes autour d’un médicament capable de soigner la maladie ; de plus, trois malades guéris par ce nouveau traitement ont été assassinés. En 1991, le sida était perçu comme une espèce de nouvelle peste touchant essentiellement les homosexuels. Le monde politique ne prêtait qu’une attention distraite à cette population peu « fréquentable », et le monde scientifique voyait d’un mauvais œil l’arrivée d’un concurrent dans les demandes de subventions publiques et les sollicitations auprès de donateurs privés. À côté de cela, la jeune journaliste Sara Lowell, mariée au basketteur Michael Silverman, meneur de jeu de l’équipe des Knicks, voit sa vie basculer le jour où on lui annonce que Michael a été contaminé par le virus du sida à la suite d’une perfusion. Elle décide de mettre son émission au service de la cause et de faire connaître au grand public l’existence de la clinique et de son traitement révolutionnaire. Son initiative déchaîne les passions. Son père médecin, qui défend les recherches sur le cancer au détriment de toute autre affection, le révérend Sanders avec sa croisade anti homosexuelle et ses prêches enflammés sur la venue prochaine de l’Apocalypse… tous s’insurgent contre Sara. Mais les meurtres continuent. Le jeune inspecteur Sam Bernstein se trouve confronté à un imbroglio politico-scientifique. Chacun tire la couverture à soi. Est-on face à un serial killer ? Qui tire les ficelles et quels mystérieux intérêts dissimulent ces meurtres ? Harlan Coben brasse les thèmes du lobbying, de la corruption politique, du rôle des médias, du fanatisme religieux, et livre une belle étude de cette société américaine bien-pensante qui cache quantité de cadavres dans ses placards.

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