Littérature française
Grégoire Delacourt
La femme qui ne vieillissait pas
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Grégoire Delacourt
La femme qui ne vieillissait pas
JC Lattès
28/02/2018
245 pages, 18 €
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Chronique de
Stanislas Rigot
Librairie Lamartine (Paris) -
❤ Lu et conseillé par
7 libraire(s)
- Betty Trouillet
- Véronique Marchand de Le Failler (Rennes)
- Frédéric Leplat de Page 5 (Bruz)
- Delphine Olivier-Auzie de Le Pain de 4 livres (Yerres)
- Maud Derre de Thuard (Le Mans)
- Émilie Druilhe de Jeux, lis, là ! (Paris)
- Isabelle Lemaistre de L'Atelier (Saint-Mathurin-sur-Loire)
✒ Stanislas Rigot
(Librairie Lamartine, Paris)
Et si plus encore qu’au mythe de la jeunesse éternelle, Grégoire Delacourt s’était attaqué au grand roman d’amour, celui qui se doit d’affronter le temps et la durée, dans ce qui ressemble fort à son meilleur roman ?
Chantal se raconte : « à un an, je faisais parfaitement son âge ». C’est ainsi que s’ouvre le septième roman de Grégoire Delacourt et cette surprenante déclaration est la première surprise d’une longue série. Car avant que ne vienne ce qui semblait être le cœur du sujet (cette femme du titre qui est censée ne pas vieillir), une vie va être racontée, une vie tout à la fois des plus simples et des plus fascinantes, celle de Chantal qui naît l’année de la mort de Colette (1954) dans un foyer que la guerre d’Algérie va progressivement ronger, en rendant son père unijambiste, et avant que la mort accidentelle de la mère ne vienne y mettre définitivement un terme, provoquant, dans un rebond douloureux, la véritable naissance de Chantal à elle-même. Avec la concision propre à son auteur, aussi bien dans le récit que dans le phrasé (petite musique aux images souvent frappantes) ; avec le délicieux ancrage dans une époque qui semble faire feu de tout bois dans sa soif de liberté, irradiant le moindre de ses participants (les références culturelles sont nombreuses et souvent très évocatrices) ; avec cet étonnant roman initiatique où le corps (et ses absences ou ses pertes) décline une étonnante narration, une poésie chirurgicale ; avec ce sens du portrait et son art des personnages secondaires qui colorent à l’envi aussi bien l’action générale que notre héroïne ; avec son empathie pour les destins hors de la lumière et des grands cirques médiatiques, Grégoire Delacourt nous raconte à sa manière tendre souvent, parfois cruelle, un amour bouleversant de ses prémices (cette rencontre autour d’un sourire qui s’élargit comme toute réponse) à son âge de maturité qu’un temps soudainement suspendu pourrait assez paradoxalement menacer.