Littérature étrangère

Jenni Fagan

La Fille du diable

✒ Alexandra Villon

(Librairie La Madeleine, Lyon)

Troisième roman de l’autrice écossaise à paraître en France grâce aux éditions Métailié, La Fille du Diable est une ensorcelante invitation à découvrir l’envers du décor d’un immeuble maudit, à Édimbourg, sur plusieurs décennies.

Une jeune fille s’avance sur l’eau dans une étrange embarcation – un cercueil – et débarque sur les rives d’Édimbourg. Nous sommes en 1910. Elle cache sous une capuche deux petites cornes et se dirige d’un pas assuré vers une adresse : au 10 Luckenbooth Close, sur le seuil d’un grand immeuble en plein cœur de la ville. Elle, c’est Jessie MacRae, 21 ans, un caractère bien trempé, vendue par son père à un couple richissime – M. Udman ministre de la culture et sa jeune et frêle épouse Élise – pour porter leur futur enfant. Accessoirement, Jessie MacRae, c’est la fille du Diable. Et quand le démon s’en mêle, rien ne se passe comme il faudrait. Les destins de Jessie MacRae, de sa petite fille et d’Élise seront bientôt scellés dans le silence des murs de l’immeuble, hantant de leurs murmures, comme une malédiction, la vie de ses habitants sur plusieurs décennies. De 1910 à 1999, faisant se chevaucher chapitres et personnages, Jenni Fagan raconte avec fièvre l’existence de cet immeuble, véritable cour des miracles qui verra se croiser, entre autres, un taxidermiste obsédé par les ossements de sirènes, Agnès Campbell, une médium chevronnée, William Burroughs et son amant John, un travailleur des mines devenu allergique à la lumière, ou encore Dot, jeune fille de la fin du siècle, amoureuse d’un immeuble en ruines qui s’effondrera bientôt. La plume lyrique et envoûtante de Jenni Fagan avait séduit lectrices et lecteurs avec Les Buveurs de lumière, récit de fin du monde à la poésie étrange et rare. Elle livre avec La Fille du Diable un roman nerveux et puissant, délivré à travers un style incantatoire époustouflant de poésie, qui rend compte des pulsations de vie d’une ville changeante, traversée par l’Histoire, par les remous humains et hantée par sa propre mémoire.

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