Littérature étrangère

Annie Francé-Harrar

Les Âmes de feu

✒ Juliet Romeo

(Librairie La Madeleine, Lyon)

Publié en 1920, Les Âmes de feu est un des nombreux romans de la scientifique autrichienne Annie Francé-Harrar. Un magnifique roman d’anticipation redécouvert et publié pour la première fois en France.

Annie Francé-Harrar étudie la biologie quand, en 1916, elle devient l’assistante de Raoul H. Francé. De ses études à ses côtés sur la fertilité des sols, et notamment sur l’humus et le compost, elle tirera son premier roman d’anticipation Les Âmes de feu. La Terre est devenue un ensemble de mégalopoles qui ont réussi à contrôler et provoquer les phénomènes météorologiques ainsi qu’à s’affranchir de l’agriculture en créant de la nourriture artificielle. La culture est devenue une forme de savoir scientifique absolu, contrôlée par un ministère qui dicte les règles, les informations à donner aux habitants, les savoirs légaux ou non. Au milieu d’une de ces mégalopoles, A15, Henrik, un scientifique âgé, voit depuis longtemps la catastrophe se profiler. Catastrophe climatique tout d’abord, jusqu’à sa rencontre avec des âmes de feu qui peuvent visiblement reprendre leurs droits sur la Terre. Les Âmes de feu est un roman d’anticipation particulièrement visionnaire. Alors que les tables des librairies se garnissent de nouveautés traitant de la crise climatique et écologique, sous la forme d’essais ou de romans, il est intéressant de retrouver ce texte, datant de plus d’un siècle. Rien de ce qu’imagine Annie Francé-Harrar ne peut nous paraître aujourd’hui improbable. L’hyper-industrialisation et l’appauvrissement des sols est une réalité que cette scientifique avait prédit, comme en témoigne ce livre, mais aussi ses travaux qui l’ont menée au Mexique pour travailler sur la fertilité des sols. Rien de daté donc dans ce roman qui nous offre une intrigue sous tension, où la chute d’une société est ponctuée de descriptions d’une rare beauté, renvoyant, comme l’indique le traducteur Erwann Perchoc que les amateurs de SF connaissent bien, aux tableaux que l’autrice peignait à l’époque.

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