Littérature étrangère

Barney Norris

Ce qu’on entend quand on écoute chanter les rivières

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photo libraire

Chronique de Charlène Busalli

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Dans ce magnifique premier roman empreint de lyrisme, de bienveillance et d’une bonne dose d’humour, Barney Norris offre un portrait saisissant d’une petite ville anglaise, celle de Salisbury, à travers cinq de ses habitants.

La Wylie, l’Ebble, la Nadder, la Bourne et l’Avon : ce ne sont pas deux, ni trois, mais cinq rivières qui se rejoignent là où la ville de Salisbury s’est développée au fil des siècles, à l’ombre d’une imposante cathédrale qui en a remplacé une autre plus ancienne encore. Le site sacré de Stonehenge se situe non loin de là, comme si tout se réunissait dans ce coin paisible du Sud de l’Angleterre pour rappeler constamment à l’homme qu’il existe des forces bien plus grandes que lui. À l’image des rivières qui trouvent ici leur confluence, ce sont cinq voix que Barney Norris convoquent dans ce roman, cinq personnages dont les destins vont s’entrecroiser à divers instants de leur vie, comme ces cours d’eau qui se rencontrent à divers endroits de la lande avant de rejoindre la mer. Il y a d’abord Rita, une femme au parler aussi fleuri que les bouquets qu’elle vend sur son petit stand, qui va s’attirer des ennuis lorsqu’elle se fait prendre en train de vendre une certaine plante aux vertus euphorisantes. Alors que Rita s’éloigne sur sa mobylette, Sam entre en scène. Amoureux pour la première fois de sa vie, l’adolescent va avoir du mal à en profiter pleinement à partir du moment où son père se voit diagnostiquer un cancer. C’est d’ailleurs un cancer qui vient d’emporter la femme de George, un agriculteur du coin qui peine à faire face à sa nouvelle solitude. La solitude, Alison la connaît bien en tant que femme de militaire toujours en mission, la dernière en date étant l’Afghanistan. Liam, qui vient de rentrer à Salisbury après des études à Londres, fait lui aussi l’expérience d’un certain sentiment d’isolement qui le pousse à s’interroger sur sa vie. Ici réside le fin mot de ce roman lumineux : c’est ironiquement ce sens d’une solitude partagée qui nous rapproche parfois le plus les uns des autres.

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