Littérature étrangère

Sebastian Barry

L’Homme provisoire

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photo libraire

Chronique de Charlène Busalli

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Le nouveau roman de Sebastian Barry nous fait voyager de la jeune République d’Irlande au Ghana, en passant par le Londres bombardé de la Seconde Guerre mondiale, avec un fil rouge : l’histoire d’un amour éperdu.

Dublin, Irlande, 1922. Jack McNulty croise une jeune femme du nom de Mai dans la cour de l’université et en tombe immédiatement et irrémédiablement amoureux. Accra, Ghana, 1957. Jack McNulty écrit l’histoire de sa vie et, surtout, celle de son amour pour cette femme qui ne lui était en rien prédestinée. Avant même leurs fiançailles, le père de Mai le bannit de chez lui, ne supportant pas de le voir faire la cour à sa fille, qui mérite bien mieux que ce fils de tailleur alcoolique. Mais, contre toute attente, Mai décide de lier son destin à celui de Jack. Les premières années de leur mariage seront heureuses. Le couple part s’installer en Côte-de-l’Or, sur le littoral de l’actuel Ghana, où Jack obtient un poste d’ingénieur civil, tandis que Mai crée et supervise un petit centre médical pour femmes. Ils rentrent ensuite en Irlande pour élever deux petites filles, Maggie et Ursula. Mais Jack boit toujours, il se met à parier aux courses et, lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, il décide de s’engager dans les forces britanniques. Sebastian Barry brosse le portrait d’un homme plein de contradictions. Comment peut-il aimer Mai à ce point et la délaisser sans se rendre compte du chagrin qu’il lui inflige en l’abandonnant ? Comment peut-il, alors qu’il a tout pour être heureux, mettre constamment ce bonheur en péril en ne cessant de prendre les pires décisions sans même y réfléchir ? La langue sublime de Sebastian Barry donne une force inouie à cette tragique histoire d’amour entre deux êtres qui ne savent que s’aimer, contre toute logique et contre vents et marées. Car, comme le dit Jack lui-même : « Qu’est-ce qui fait qu’une âme va s’attacher à une autre ? C’est souvent comme défendre une opinion que le reste du monde cherche à réfuter. » Un roman magnifique, tout simplement.

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