Femme portant un fusil

Construit sur deux temporalités, le roman s’ouvre sur l’arrestation de Claude, une femme qui semble avoir tué quelqu’un. Claude vit avec son fils adolescent un peu décalé, du père duquel elle est séparée. Si sa vie est plutôt agréable, il lui manque quelque chose. Lorsqu’elle tombe sur l’annonce d’un hameau à vendre à la campagne, elle sent qu’elle touche du doigt ce qu’elle attendait sans le savoir. Reste à savoir comment y parvenir, Claude n’ayant pas les moyens de s’acheter un hameau, fût-il à l’abandon. De fil en aiguille, le hasard met sur sa route Élie et Harriet d’abord, puis d’autres ensuite. Ensemble, elles vont reprendre le hameau et amorcer un exode pour fuir la société qui les opprime, de manière explicite ou non. Toutes ont souffert du poids d’une société pensée par les hommes, pour les hommes et dans laquelle elles sont au mieux effacées, au pire agressées. Inspiré des Women’s lands, leur hameau devient un lieu d’accueil pour les femmes puis il prend petit à petit une figure militante au fur et à mesure que de nouvelles habitantes arrivent. Si le lieu est en ébullition, entre travail de la terre et réflexions intellectuelles, cela n’est pas du goût de tous les voisins qui commencent à questionner les activités du hameau ‒ en particulier Michel, le plus proche voisin qui exerce un droit de passage sur la route le traversant. Intelligemment construit, le roman nous annonce dès le début la fin plutôt tragique de l’aventure du hameau, tout en ne révélant rien des tenants et des aboutissants qui apparaîtront au fil des pages. Reconstruisant petit à petit le parcours de Claude jusqu’à son geste fatidique, le lecteur est happé dans un tourbillon littéraire au style brut et au sujet fort. Entre roman féministe et thriller rural, il soulève de véritables questions de société.