Littérature étrangère

Nancy Bernkopf Tucker

Le Premier Jour du printemps

✒ Nathalie Iris

(Librairie Mots en marge, La Garenne-Colombes)

L’enfance nous marque-t-elle à jamais ? Peut-on faire table rase d’un passé misérable pour construire un avenir lumineux ? Tel est l’enjeu de ce roman, à travers le parcours cabossé de la jeune Chrissie, un personnage magnifiquement attachant !

Voici un roman très fort, dont l’histoire, inspirée d’un fait divers réel, happe totalement le lecteur. Nous sommes dans un quartier très pauvre d’une ville moyenne du Nord de l’Angleterre, de nos jours. Chrissie est une fillette d’à peine une dizaine d’années qui vit avec sa mère, laquelle la délaisse totalement, ne se préoccupe jamais de savoir où elle est et oublie même souvent de lui donner à manger. Quant à l’éducation, Chrissie n’en a bien sûr aucune, livrée à elle-même en permanence. Son père, lui, vient la voir de temps en temps, mais ce n’est pas mieux, il est aussi alcoolique que la mère. La plupart du temps seule, chassée de chez elle, Chrissie ignore tout de la vie, son quotidien est fait de solitude et de misère. Un jour, elle commet un geste malheureux et irréparable en étranglant à mort le petit frère d’une de celle qu’elle considère comme sa meilleure amie. Pourquoi ce geste ? Chrissie elle-même ne saurait l’expliquer. Chrissie ne sait d’ailleurs même pas ce qu’est la mort et pense que le garçonnet va ressusciter. Des années plus tard, nous retrouvons Chrissie qui, après avoir purgé sa peine, devient maman à son tour. Elle n’a qu’une idée en tête, élever sa fille Molly le plus normalement possible, sous l’étroite surveillance des services sociaux. Chrissie est désemparée : comme elle n’a aucun code, elle vit avec la peur de reproduire le schéma maternel qu’elle a elle-même connu. Va-t-elle arriver à rompre ce cercle infernal ? Ce livre, écrit à hauteur d’enfant puis de maman, est à la fois poignant et lumineux. Le personnage de Chrissie est d’une force incroyable. Et au-delà de l’histoire, c’est un témoignage sur l’enfance maltraitée, mal-aimée et un message d’espoir pour ceux qui ont connu la misère affective et matérielle : il est possible de s’en sortir.

 

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