Littérature française

Louis Aragon

Les Chambres

Chronique de Nicolas Mouton

Librairie Le Presse papier (Argenteuil)

Les Chambres, recueil de 1969, contemporain de son essai sur les incipit et des dernières pages de son Henri Matisse, roman (coll. « Quarto », Gallimard), est l’un des livres les plus forts, les plus modernes d’Aragon. Il reste toutefois l’un des plus mal connus. Pour saluer les 40 ans de la mort du poète, Gallimard a l’heureuse idée de le rééditer en collection « Blanche ». Ce « poème du temps qui ne passe pas », comme coincé au travers de la gorge, se distingue par ses vers brisés, ses amers silences et le spectre d’une mort annoncée : « À qui laisser mon héritage un cyanure/De mots tombés des utopies ». Désespéré par l’effondrement de ses illusions après l’invasion de la Tchécoslovaquie, l’entrée dans le grand âge et la santé d’Elsa, qui mourra en 1970, Aragon chante en ces Chambres « le lieu de nous où toute chose se dénoue ». Ce noir diamant brille d’un éclat unique, auprès du dernier roman d’Elsa Triolet, Le Rossignol se tait à l’aube ; une mémoire en abîmes.

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