Myriam Leroy poursuit son œuvre résolument féministe en s’attelant à nous faire revivre la destinée fulgurante et anonyme de Marina Chafroff, résistante belge, tombée dans les oubliettes de l’Histoire.

Au détour d’une balade dans la section d’honneur des tombes de la Seconde Guerre mondiale à Bruxelles, l’autrice est interpellée par l’une d’entre elles : « Marina Chafroff DÉCAPITÉE ». Intriguée Myriam Leroy, journaliste de formation, souhaite en savoir davantage et entame son enquête. Une photo, un vague documentaire réalisé par un universitaire espagnol, le témoignage d’un de ses fils : les données sont lacunaires et une investigation approfondie sera nécessaire. L’écrivaine se met dans la peau de Marina Chafroff et cherche à comprendre le raisonnement de cette femme ordinaire, exilée russe, décidée à combattre l’envahisseur allemand. Marina renaît alors : jeune fille d’ascendance noble, elle s’amourache de Youri, homme ambitieux et séducteur, très vite flagorneur et père de ses deux enfants. Ceci est la portion congrue d’une biographie méconnue mais le talent de Myriam Leroy fait le reste : elle prête des pensées à Marina qui, négligée par un époux inconséquent et séducteur, se met à écouter Radio-Moscou et bascule vers la Résistance. Le roman s’amplifie en imbriquant les réflexions de l’autrice, ses expériences, ses doutes et les coïncidences qui, lorsqu’elle se décourage dans l’écriture de ce texte, la relance inexorablement. Marina Chafroff et Myriam Leroy se superposent alors et sont le reflet d’une société qui, quelle que soit la période, relègue les femmes au second plan et les assignent à un rôle subalterne, quitte à en supprimer la mémoire et les faire sombrer dans l’oubli le plus total. D’une écriture fluide et acérée, l’autrice esquisse le portrait d’une femme qui se libère de la lâcheté des hommes pour aller au bout de ses idées et combattre l’abomination nazie. Plus qu’une biographie, un roman d’une modernité absolue au ton décapant et féroce !