Bande dessinée

Nicolas de Crécy

La République du Catch

illustration

Chronique de Guillaume Boutreux

Librairie M'Lire (Laval)

S’il est un endroit à visiter absolument, c’est bien La République du Catch ! Nouveau projet du trop rare Nicolas de Crécy, La République du Catch est né au pays du Soleil levant avant de débarquer en France. Comme le prouvent les pages qui suivent, le résultat est détonant !

Après des études aux Beaux-Arts d’Angoulême et un début de carrière dans l’animation chez Disney, Nicolas de Crécy s’est fait connaître dans le monde de la bande dessinée avec Foligatto, un premier album paru aux Humanoïdes associés immédiatement salué par la critique. Son dessin, littéralement vibrant, fait montre d’une grande maîtrise graphique, ce que confirmeront des séries comme Léon la Came (Casterman) et Le Bibendum céleste (Les Humanoïdes associés), qui seront récompensées par de nombreux prix. Outre la qualité de son trait, le dessinateur lyonnais se distingue par l’originalité de ses histoires. Ses paysages – souvent urbains – transpirent une folie douce qui s’empare de ses personnages, humains, animaux ou même fantômes. Autant de doux dingues terriblement attachants plongés dans des situations surréalistes. Dans la même veine, Nicolas de Crécy écrira les quatre tomes de Salvatore (Dupuis), un conte loufoque relatant la quête amoureuse d’un chien mécano, ou encore le Journal d’un fantôme (Futuropolis). À noter également dans sa bibliographie l’album Période Glaciaire (Futuropolis), qui inaugura la série d’albums coédités par Futuropolis et le musée du Louvre. Le lecteur pouvait y suivre un groupe d’archéologues découvrant Le Louvre sous les glaces d’un futur gelé. Parallèlement à la sortie de Période Glaciaire, Nicolas de Crécy devient lauréat d’une résidence à la Villa Kujoyama à Kyoto, qui concrétise l’attrait de l’artiste pour le Japon. C’est sur cette base que naîtra quelques années plus tard le projet de La République du Catch. Shueisha Publishing, prestigieux éditeur japonais, offre alors une carte blanche à Nicolas de Crécy pour réaliser un « manga » publié par épisodes sur dix mois dans le célèbre magazine Ultra Jump. Une version intégrale de l’histoire vient de paraître chez Casterman, tout en sortant simultanément au Japon. Si la gageure était grande de concilier son style graphique et narratif avec la culture et le format « manga », le fruit du travail de Nicolas de Crécy est pour le moins époustouflant. Préférant un trait à l’encre de chine souligné d’un lavis de gris, le dessinateur obtient un graphisme à la fois précis et dynamique. De plus, avec La République du Catch, Nicolas de Crécy réinterprète de façon tout aussi originale le pandémonium japonais ainsi que la figure du yakuza. Alors, une chose est sûre, vous ne sortirez pas indemnes des aventures échevelées de Mario, vendeur de pianos mélancolique, meilleur ami d’un manchot (l’animal) pianiste, amoureux déçu d’une catcheuse nommée Bérénice, oncle d’Enzo, odieux parrain de la famille au corps de bébé et ami inopiné de bien curieux fantômes !