Littérature étrangère

Maxim Biller

L’Amour aujourd’hui

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photo libraire

Chronique de Béatrice Putégnat

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Dans L’Amour aujourd’hui, Maxim Biller dissèque les figures de l’amour, de l’être ensemble et de la solitude. Des nouvelles au goût 
de chocolat noir amer à déguster comme une absinthe au fond 
d’un bar interlope.


En vingt-sept nouvelles finement ciselées et férocement satiriques, Maxim Biller livre la chronique d’histoires d’amour désenchantées ou improbables. L’amour aujourd’hui est-il un sentiment impossible dans une Europe de l’exil et de l’errance où les êtres se rencontrent, se croisent, font parfois l’amour, avant de se quitter le sourire aux lèvres ou l’amertume au cœur ? Né à Prague de parents juifs et russes, Maxim Biller a émigré en Allemagne à l’âge de 10 ans. Ses nouvelles dépeignent les affres de l’amour entre Berlin, Hambourg, Munich, Prague et Tel-Aviv. Rencontres fugaces ou couples installés, errance, partance, mort, vacuité de la relation à deux, ces tranches de vie, instantanés en noir et gris, nous plongent au cœur de l’intime des êtres, là où ils se regardent agir, penser, aimer tout en sachant que le Je est forcément d’ailleurs, n’est déjà plus là. Une plongée dans les ténèbres du sentiment et de la sensualité qui pourrait faire penser à des photos de Nan Goldin. Les femmes et les hommes se rencontrent, se jaugent, se passionnent, se séduisent, font l’amour, se séparent ou se trouvent séparés par d’autres péripéties, d’autres impératifs. Comment deux êtres de solitude pourraient-ils espérer construire, alors qu’il n’est que de connivence factuelle, d’amour de passage, et qu’au bout, l’individu est seul au monde, seul avec lui-même ? Qu’ils se connaissent depuis l’enfance, qu’ils aient joué ensemble ou qu’ils se soient rencontrés à la synagogue, qu’ils se croisent dans la rue, à une fête, ils ne partagent qu’un petit laps de temps. Chacun repart de son côté, chacun est toujours seul jusqu’à l’absurde. Ces héros des temps modernes se heurtent, se cognent dans les jeux de l’amour et des hasards de la vie, de l’Histoire. Individus à la fois désespérément libre et totalement brinqueballés par les événements et le poids de l’histoire, de la famille, de la religion, ils ne connaissent pas d’amour heureux. L’amour comme viatique métaphysique. Très fort !

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