Littérature étrangère

Peter Stamm

Au-delà du lac

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photo libraire

Chronique de Mélanie Le Loupp

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Le lecteur était certainement resté avec un goût amer après la lecture de Sept ans. Peter Stamm y disséquait les tromperies d’un homme envers son épouse et sa maîtresse et, surtout, y montrait l’ignominie, le mensonge, la cruauté. Le voilà de retour avec des nouvelles.

Peter Stamm est suisse. Il a beaucoup voyagé, il parle couramment plusieurs langues et exerce aujourd’hui les métiers de journaliste et d’écrivain. L’auteur livre aujourd’hui un recueil de nouvelles qui ont toutes pour point commun de se dérouler aux alentours du lac de Constance. Tel un chirurgien, il y dissèque certains instants de vie. Il saisit tout à la fois l’inaudible et l’indicible d’un instant. En l’espace de quelques pages, le pire comme le meilleur de chaque personnage est posé sur le papier et laisse le lecteur parfois perplexe quant à la condition humaine et la morale de chacun. En aucun cas, Peter Stamm ne se pose en juge. Il ne dresse pas un tableau psychologique de ses personnages et des situations dans lesquelles ils s’embourbent. Il brosse plutôt des portraits et laisse son histoire faire écho auprès de son lecteur. Car chaque texte est une expérience au cours de laquelle le lecteur se laisse guider comme hypnotisé par ce dont sont capables l’homme et la femme. C’est ainsi que Au-delà du lac renouvelle les sensations que l’on a déjà pu éprouver auparavant. Un malaise s’impose automatiquement à la lecture des dix nouvelles. Peter Stamm réussit à décortiquer sans y paraître l’indicible et l’inavouable de chaque personnage. Au cours de « Dans la forêt », Anja retourne à la condition primaire et animale. Elle est perdue et se cherche dans le silence de la forêt – autant que les personnages de Thoreau ou de Krakauer dans Into The Wild –, mais également dans le regard des hommes car elle devient un animal. Les influences sont nombreuses et c’est ainsi que l’on se met presque à penser au célèbre film Shining (tiré du roman de S. King) lorsqu’on lit « Les estivants », sans doute parce que l’atmosphère de cette nouvelle est aussi opaque que celle du film. Encore une fois, on finit la lecture de ses nouvelles avec un goût amer. Certainement celui de ne pas avoir le talent de l’auteur.