Littérature française
Anne Delaflotte Mehdevi
Trop humain
Partager la chronique
-
Anne Delaflotte Mehdevi
Trop humain
Buchet Chastel
11/01/2024
160 pages, 21,50 €
-
Chronique de
Ophélie Drezet
Librairie La Maison jaune (Neuville-sur-Saône) - ❤ Lu et conseillé par 22 libraire(s)
✒ Ophélie Drezet
(Librairie La Maison jaune, Neuville-sur-Saône)
Anne Delaflotte Mehdevi quitte le roman historique pour nous offrir un roman bouleversant de sincérité et de justesse dans un petit village rural où une singulière technologie le met face à son histoire et ses contradictions.
À Tharcy, comme dans beaucoup de villages, l’attrait pour les villes a exercé son pouvoir sur les plus jeunes et il est maintenant complètement déserté. Mais l’heure est à l’air pur et la bourgade se repeuple gentiment. Monsieur Peck est un de ces nouveaux arrivants : il est retraité, ancien ingénieur et tombe gravement malade. Il décide pour l’accompagner de se doter d’un « auxiliaire de vie électronique », Tchap, un robot humanoïde qui le soigne, s’occupe de lui et devient un véritable compagnon. Les deux vont tisser une amitié avec Suzie, la tenancière du café du village. Suzie vit seule avec ses souvenirs et un mystère autour de son passé. Elle n’a jamais voulu partir. Sa rencontre avec Monsieur Peck et surtout Tchap va complètement changer son quotidien. En effet, ce dernier, pour faire évoluer son programme, doit recueillir des souvenirs pour comprendre la complexité des sentiments humains. Ainsi, il va écouter Suzie et elle va parler, lui raconter et nous raconter l’histoire du café, du village et de sa famille. Nous plongeons avec eux dans les années 1930 lorsque la mère de Suzie possédait déjà le troquet. Tchap va découvrir ce que les hommes sont capables de faire et la manière dont les émotions guident leurs choix et peuvent les renforcer. Pendant ces longues heures de tête-à-tête, la méfiance monte dans le village qui voit d’un œil méfiant l’arrivée du robot. Quelle beauté et quelle sensibilité ! La justesse dans l’écriture des sentiments et des comportements nous attache inévitablement aux personnages : quelle tristesse de quitter Suzie, Tchap et les autres à la fermeture du livre ! L’acuité de l’autrice dresse le portrait juste et cynique de l’humain en communauté avec des personnages à la force et à la beauté incomparables.