Littérature étrangère

Imbolo MBue

Puissions-nous vivre longtemps

illustration

Chronique de Aurélie Baudrier

Librairie L'Insomnie (Décines-Charpieu)

De l’engagement, il y en a assurément dans le nouveau roman d’Imbolo Mbue. Après le très remarqué Voici venir les rêveurs (Belfond et Pocket), la romancière née au Cameroun signe une fable politique dans laquelle elle dénonce l’exploitation du continent africain.

À Kosawa, village africain imaginé par l'auteure, les enfants meurent les uns après les autres, victimes de l’eau contaminée qu’ils consomment. La faute à l’entreprise pétrolière américaine Pexton qui a volé leurs terres et les exploitent depuis trois décennies, à la recherche du précieux or noir. Les rivières sont devenues vertes, les terres infertiles et l’air irrespirable. La compagnie réunit toutes les huit semaines les villageois pour essayer d’apaiser leur colère. Mais un soir d’octobre 1980, alors que l’assemblée touche à sa fin, Konga, le fou du village, prend la parole et annonce que la réunion ne fait que commencer. Sous son impulsion, les habitants décident alors de faire prisonniers les émissaires envoyés par Pexton. Cette soirée marque pour eux le début d’un long combat pour récupérer la terre de leurs ancêtres. Cette révolte va s’incarner en Thula, jeune fille du village qui, grâce à une bourse, part étudier aux États-Unis. C’est par les membres de sa famille et par ses amis d’enfance que l’histoire de ce soulèvement va nous être contée. Kosawa, né dans la tête d’Imbolo Mbue, se révèle être le symbole d’un continent pillé. Car Kosawa, c’est l’Afrique. Une terre riche convoitée et exploitée depuis des siècles, livrée par des gouvernements corrompus à l’avidité des grandes puissances et dont l’exploitation des ressources naturelles se fait souvent au détriment de ses habitants. L’auteure décrit parfaitement les ravages de la mondialisation, les liens qui unissent aujourd’hui les citoyens du monde et le rôle qu’ont certains sur la vie des autres. Son roman en appelle à la responsabilité de chacun et questionne. « Ont-ils pensé aux enfants qui souffriront, comme nous avons souffert jadis, pour qu’ils ne manquent jamais de carburant ? »