Polar
Qiu Xiaolong
Il était une fois l’inspecteur Chen
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Qiu Xiaolong
Il était une fois l’inspecteur Chen
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Adélaïde Pralon
Liana Levi
03/10/2016
240 pages, 19 €
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Chronique de
Maria Ferragu
Librairie Le Passeur de l'Isle (L'Isle-sur-la-Sorgue) -
❤ Lu et conseillé par
2 libraire(s)
- Eve Bohu de Chimère (Chatillon)
- Maria Ferragu de Le Passeur de l'Isle (L'Isle-sur-la-Sorgue)
✒ Maria Ferragu
(Librairie Le Passeur de l'Isle, L'Isle-sur-la-Sorgue)
C’est un extraordinaire roman que nous livre Qiu Xiaolong à travers la jeunesse de l’inspecteur Chen, où il partage avec nous la sombre histoire de la révolution culturelle et une des clés de son parcours d’écrivain.
Dès le préambule, on comprend que l’histoire qui va nous être racontée est bien plus qu’un simple roman puisque l’auteur s’adresse directement au lecteur et nous dévoile l’histoire de sa famille, notamment de son père victime de la « critique révolutionnaire de masse des ennemis de classe ». Ce sera une période sombre pour la famille entière, mise au ban de la société, car marquée du sceau des « monstres noirs ». Ce n’est donc qu’après ce récit que commence le roman. Le jeune Chen Cao, après une adolescence marquée par la révolution culturelle, a fini ses études en langues étrangères et se retrouve (non par choix) assigné à un poste subalterne dans un commissariat. Il passe une partie de ses journées à lire des romans étrangers et à traduire des manuels. Une enquête confiée à son commissariat va l’emmener pour la première fois sur le terrain. Fu, commerçant spolié sous Mao puis réhabilité et finalement indemnisé, est retrouvé assassiné. Cet homme riche, fâché avec ses enfants, vivant avec une jeune domestique, était un épicurien et son plaisir vital était la bonne chère. A-t-il été tué pour son argent, pour ses choix de vie ? Chen va donc suivre les traces de Fu à travers les cuisines privées de la ville (nous offrant quelques scènes truculentes au passage), les maisons shikumen, tout en découvrant les manipulations politiques auxquelles sont soumis les hommes de sa fonction. Les écrits de Qiu Xiaolong ont toujours été marqués par les événements de sa vie et par une critique des appareils politiques. À travers une conclusion brillante, où il s’excuse de reprendre la parole en narrateur « peu fiable », il nous dévoile une histoire vraie qui le hante depuis toujours et qui a sûrement fait de lui l’écrivain qu’il est devenu. On y retrouve son amour précoce pour les livres et son âme de poète.