Littérature française

Michel Quint

Misérables !

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photo libraire

Chronique de Christèle Hamelin

Librairie Le Carnet à spirales (Charlieu)

En homme du Nord, Michel Quint se tourne à nouveau vers sa terre natale et pousse un peu plus loin, jusqu’à la mer. Laisse Roubaix derrière lui, Roubaix la pauvre, la chômeuse, théâtre de son précédent roman, Apaise le temps (Phébus), ville qu’il avait su rendre attachante. Une pause à Lille. Puis, en homme de cœur qui sait dire avec une justesse incroyable toute l’humilité et la détresse des petites gens, la souffrance des plus démunis, il pose ses valises à Calais. Ou plutôt les valises de Laurent, ancien policier reconverti qui, lassé d’enquêter sur les morts, a décidé de se consacrer aux vivants en intégrant une compagnie d’assurance où son rôle consiste à retrouver les bénéficiaires d’assurances-vie jamais réclamées. La tâche s’annonce difficile, l’heureux légataire d’un beau magot laissé par une riche et vieille dame, un certain Freddy, ayant disparu de la circulation en juin 1981. Laurent croisera d’abord Alyson, la réceptionniste de l’hôtel où il loge, une fille du Nord elle aussi, touchante ingénue, et Duni, réfugié sans refuge qui cache sa misère sous sa dignité, tous deux rêvant d’un ailleurs inaccessible. Puis ses pas et son instinct d’ex-flic le guideront vers Sonia, déroutante et sensuelle, maillon de la chaîne qui relie Laurent à Freddy l’évaporé, ce beau gosse arriviste, ce « bel ami » issu d’une modeste famille lilloise. Et surtout, son imagination galopante retracera la trajectoire du disparu jusqu’à le rendre tangible dans ce printemps 1981 où la gauche prend le pouvoir et ouvre les champs du possible. Une quête troublante, difficile, passionnante qui nous donne à voir une ville bigarrée, des quartiers bourgeois à la jungle, de la zone portuaire aux plages, Calais, reine déchue de la dentelle transformée en « purgatoire infernal des migrants vers le Royaume-Uni ».