Marguerite Martin
Librairie Terre des livres, Lyon
Quelle est votre mission de libraire préférée ?
Conseiller une personne qui ne sait absolument pas ce qu’elle veut, si ce n’est choisir un livre pour elle-même. Car cerner cette personne inconnue, dans une économie de questions, l’écouter, l’observer avec finesse et intensité, la mettre en confiance est un défi absolu. Puis le choix, rapide, calme et assuré, de peu de livres en est un autre. Après avoir cerné, ciblé, vient le temps de parler du contenu de ces livres. Tout ceci en quelques minutes. C’est une mission folle !
Quel livre vous a le plus marqué ?
Dans ma vie précédente auprès d’un orchestre symphonique, à la question « Quel est votre concerto préféré ? », posée naïvement à une immense pianiste russe, « Celui que je joue en ce moment. » fut une réponse éclairante. Je suis marquée par le livre dans lequel je suis plongée. En me retournant, un roman, lu enfant, m’a procuré des sensations d’une force inouïe : Le Grand Meaulnes. Je dois citer le recueil de poèmes Possibles futurs d’Eugène Guillevic, dont la lecture a fait de moi une boulimique de recueils poétiques. Et s’il faut choisir : Le Bonheur des tristes de Luc Dietrich, ingénue confession d’un être qui n’a jamais guéri de son enfance et allie des images dures à une sensibilité tendue vers le détachement. C’est le livre que je voudrais mettre entre toutes les mains, car je crois qu’il rend le monde meilleur.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir libraire ?
La conviction partagée par un ensemble de personnes hors de moi que ce métier me correspondait, couplée à un projet de reprise d’une librairie qui avait pour spécialité ma passion première : la musique. Ce projet n’a pas vu le jour. Mais tout au long du parcours de reconversion, lors de ma formation comme des stages, chaque rencontre est venue nourrir l’idée implantée par d’autres que j’avais les capacités, comme lectrice et comme communicante pour revêtir l’habit de libraire avec dignité. Comme disait Jean-Marie Ozanne (Folies d’Encre) au micro d’Olivia Gesbert dans Le Book Club de France culture du jeudi 12 janvier 2023, il ne suffit pas d’aimer les livres pour être libraire, il faut aussi aimer les gens. L’amour des livres et des gens m’anime. Et l’amour de l’ouverture des cartons qui me rappelle quotidiennement la joie de Noël !