Littérature française

Étienne Kern

La Vie meilleure

SH

✒ Stéphanie Hanet

(Librairie Coiffard, Nantes)

Comme pour son précédent roman, Les Envolés, Étienne Kern commence par dérouler sous nos yeux un court film en noir et blanc. On est en 1923 et Émile Coué est attendu comme le Messie sur les quais new-yorkais.

Alors qu’il débarque du Majestic, une équipe de reporters surgit pour interroger « Miracle man ». « Miracle man », c’est le surnom que les Américains lui ont donné. L’homme sourit. « Il sourit des lèvres, des yeux, des moustaches », écrit Étienne Kern. Il a des raisons de sourire cet Émile Coué, inventeur de la « méthode Coué ». Il est l’homme de l’autosuggestion positive : « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux ». Il en a fallu du temps, des efforts, des moqueries à surmonter, la déception d’un père, pour en arriver là. L’homme est suffisamment étonnant et complexe pour fasciner Étienne Kern qui se penche avec talent sur ce pharmacien, fils de cheminot, né à Troyes en 1857. Un homme qui, cent ans après, nous parle encore, dit des choses de nous. « Tout cela, je l’invente, bien sûr. Je fais du Coué : j’imagine », confie Étienne Kern en tentant de saisir avec poésie et délicatesse ce que fut la vie de cet homme discret, habitué à l’échec et à la perte. Ce que l’auteur n’invente pas, ce sont ses propres souvenirs d’enfance autour d’André et d’Irène. André et Irène et leur petite maison, pas loin du pré. Comme Émile Coué, eux aussi sont entourés de rose, de bleu et de doré. Comme Émile Coué, ils ont été traversés par le deuil d’un enfant. De la même manière que dans Les Envolés, l’auteur, à travers l’écriture, met en lumière un oublié, va chercher ses parts d’obscurité pour tenter de les éclairer. La Vie meilleure est un texte court et plein de joie, d’éclats de rire et d’espoir alors qu’il parle de toutes ces promesses que la vie ne tient pas. C’est cela qui est beau, qui nous transporte. C’est aussi toute une époque qu’Étienne Kern déploie et où l’on s’aperçoit que l’être humain d’hier a les mêmes aspirations que celui d’aujourd’hui.

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