Littérature française

Clémence Boulouque

L’Amour et des poussières

JA

✒ Jean-Luc Aubarbier

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Entre l’idéal absolu, la poursuite de l’amour unique et les contingences de l’existence, Dora, jeune photographe cherche le bonheur, désespérément mais non sans humour. Le nouveau roman de Clémence Boulouque.

Tout comme l’auteur, Dora, la narratrice de L’Amour et des poussières, vit à New York où elle est photographe. D’une enfance douloureuse marquée par un beau-père qui s’est permis des attouchements déplacés, elle garde une douleur inguérissable, mais aussi un besoin de pureté et d’absolu. Elle suit des cours de théologie auprès de Steve, son professeur qui meurt lentement de la maladie de Charcot. Infirme, diminué, il règne sur sa tête mais plus sur son corps, sur le passé mais plus sur le présent. Il lui a légué une théorie philosophique, véritable recette du bonheur : il faut imiter l’amour pour le faire naître. Aucun de ses amants passés n’a su la combler. Lorsqu’elle rencontre Ari, il a tout de l’homme idéal. Prévenant, amoureux, d’un haut niveau culturel, cet astronome la traite comme une nouvelle étoile. Faut-il croire au destin ? À l’âme sœur ? Elle a envie d’y croire, alors elle y croit. Dans ce roman métaphysique persillé de Talmud et ponctué de rires tragiques où la Kabbale intervient pour aider Dora à jouer sur les mots et sur les nombres, la phrase maîtresse est : « L’homme pense, Dieu rit ». Dora emmène Ari à Paris pour lui faire rencontrer sa famille et ses amis écrivains. Las ! Le prince charmant se transforme vite en rabat-joie. Le juif new-yorkais ashkénaze ne supporte pas le laisser-aller des Sépharades (qu’ils nomment « Marocains » avec mépris). Le scientifique trouve les écrivains superficiels et prétentieux. Par-dessus tout, il confesse la mère de Dora pour tout apprendre sur sa future épouse. Elle qui voulait tourner la page de son passé douloureux se retrouve face à un juge qui est aussi l’homme qu’elle aime… ou qu’elle croit aimer. Car dans cet être soupçonneux, intolérant, étouffant et insupportable, comment reconnaîtrait-elle celui qui avait su la séduire. En définitive, elle devra apprendre à rester seule, face au vide.

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