Événement majeur du XXe siècle, la Seconde Guerre mondiale est un conflit d’une brutalité inédite que, malgré la multiplicité des documents et ouvrages à son sujet, nous peinons parfois à appréhender dans sa globalité.

En écrire l’histoire totale ne signifie pas uniquement l’envisager comme un conflit international, concernant aussi bien les opérations des fronts de l’Ouest et de l’Est que celles du Moyen-Orient ou du Pacifique. Il s’agit aussi de ne pas se limiter aux relations géopolitiques et aux opérations militaires. L’Histoire n’est pas seulement celle des décisions des « grands hommes » et de leur application sur le terrain : elle engage les structures économiques, sociales, les superstructures idéologiques et culturelles, comme l’ont par exemple très bien montré les travaux de Johann Chapoutot et de Christian Ingrao sur la révolution culturelle nazie et les intellectuels du IIIe Reich. Et si l’exposé d’Olivier Wieviorka suit les grands mouvements du conflit, la marche de la diplomatie et des alliances, la stratégie militaire, il les situe dans un contexte permettant d’en éclairer la logique et les paramètres. Par exemple, en quoi ses acteurs furent-ils motivés par l’idée d’une guerre de race ? Comment les combattants étaient-il conditionnés à cette violence inédite, au meurtre de populations civiles ? Quand et comment a-t-on commencé à parler de guerre « mondiale » ? Embrasser un ensemble de phénomènes, de causalités et d’acteurs aussi complexe est une gageure, le restituer en un récit digeste pour des lecteurs l’est tout autant. À mesurer le caractère vertigineux de l’historiographie de la Seconde Guerre mondiale, on peut apprécier le travail de synthèse accompli. C’est qu’Olivier Wieviorka ne prétend pas non plus à l’exhaustivité et envisage aussi sa discipline comme la cristallisation d’un état des recherches à un moment donné et, s’appuyant sur une historiographie récente, il évoque aussi les débats entre historiens, confronte les mythes et les idées reçues aux conclusions scientifiques.