Polar

Don Winslow

Missing : Germany

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Chronique de Alexandra Villon

Librairie La Madeleine (Lyon)

Après Missing : New York, Frank Decker reprend du service, cette fois-ci direction l’Allemagne. Mais personne ne va lui faciliter la tâche. Son monde est un désenchantement : une bergerie peuplée par des loups déguisés.

Frank Decker retrouve des personnes disparues. C’est sa spécialité. On l’avait découvert en 2015 dans Missing : New York sur les traces de Marie Hailey Hansen, une petite fille afro-américaine, à travers une enquête qui allait durer plusieurs mois et pour laquelle il allait abandonner sa femme, son boulot et sa vie. Frank est un obstiné qui va jusqu’au bout. Cette nouvelle enquête ne déroge pas à la règle. Son ami milliardaire Charles Sprague, qui lui a sauvé la vie pendant la guerre en Irak, fait appel à lui pour retrouver sa magnifique épouse Kim qui s’est récemment volatilisée. En marge de la police officielle, loup solitaire, Frank Decker va se mettre en chasse dans une traque qui le mènera jusqu’en Allemagne, dans les milieux interlopes de la prostitution de luxe. Et pour un marché aussi lucratif que celui-ci, la mafia ne se tient jamais bien loin des puissants corrompus. Decker gravite dans un monde vicié jusqu’à la moelle où l’humanité n’a qu’une valeur de pacotille face à la toute-puissance du pouvoir et du fric, ce qui a le don de le mettre en rogne, marqué par le fer rouge du cynisme : « Mais le problème était peut-être l’humanité elle-même : nous n’étions que des singes munis de pouces opposables, capables de fabriquer des armes ». Les chapitres courts et efficaces de ce page turner diablement palpitant, truffé de scènes d’action, de courses poursuites, de fusillades et de baston, mettent en scène un héros aux méthodes expéditives qui mène son enquête tambour battant, en jouant sa vie comme on parie une main hasardeuse au poker : avec culot et savoir-faire. Et malgré cette frénésie de violence et de fureur, Don Winslow n’oublie pas de faire souffler ses lecteurs, distillant avec bonté et malice une bonne dose d’humour salvateur et quelques pincées d’amour.

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