Littérature étrangère
Asli Erdogan
L’Homme coquillage
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Asli Erdogan
L’Homme coquillage
Traduit du turc par Julien Lapeyre de Cabanes
Actes Sud
14/03/2018
208 pages, 19,90 €
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Chronique de
Anaïs Ballin
Librairie Les mots et les choses (Boulogne-Billancourt) - ❤ Lu et conseillé par 16 libraire(s)
✒ Anaïs Ballin
(Librairie Les mots et les choses, Boulogne-Billancourt)
En publiant ce premier roman, Actes Sud démontre, s’il en était encore besoin, l’immensité du talent d’Asli Erdogan, écrivaine turque tout juste récompensée le 16 mars dernier des insignes de Chevalier des Arts et des Lettres.
Actes Sud, éditeur de l’auteure turque en France, publie ces jours-ci L’Homme coquillage, premier roman de l’écrivaine Asli Erdogan dont on parle beaucoup depuis quelques mois. Loin de l’opportunisme de la récupération d’une notoriété à la fois médiatique, politique et intellectuelle, on trouve un véritable sens à la lecture de cette œuvre où tout, tout ce qui nous transcende, nous tord, nous marque durablement, y est présent : la sensualité exacerbée, l’écriture hypersensible, le désespoir ambiant, la révolte, la colère. Il y a aussi la violence, latente, réelle, crue et qui habite les personnages, tout autant que l’auteure. Et puis la passion : qu’elle soit pour l’amour ou la liberté, par-dessus tout. Dans L’Homme coquillage, Asli Erdogan raconte l’histoire d’une femme, en même temps qu’elle raconte celle d’un monde teinté de cynisme et d’hyper-performance à outrance. Elle raconte l’histoire d’une société dont les humanités et les rouages sont aux antipodes les uns des autres. Elle raconte l’amour et l’amitié. De celles qui surgissent lorsque l’on ne les attend pas, qui nous sauvent de quelque chose, à un instant T. Avec ce lyrisme qui lui est si caractéristique, avec une certaine dose d’humour et cette capacité à doter ses personnages d’une propension infinie à l’autodérision, avec une lucidité à toute épreuve sur le monde, mais avant tout sur elle-même, sur ce qu’elle est et ce qui transparaît d’elle dans ses romans, la romancière nous entraîne inexorablement et nous pousse au passage dans des retranchements que l’on explore avec elle de page en page.