Essais

Vladimir Jankélévitch

L’Esprit de résistance

photo libraire

Chronique de Amel Zaïdi

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Radié de l’Université en 1940, traqué et vivant dans la misère, Jankélévitch conservera à jamais une profonde blessure de ces années noires qui détermineront sa fidélité à la philosophie de la morale.

Composé par Françoise Schwab, Jean-Marie Brohm et Jean-François Rey, ce recueil présente des textes inédits du philosophe rédigés dès 1943, en pleine période de Résistance et de clandestinité, mais aussi des fragments de correspondances, notamment avec Geneviève de Gaulle-Anthonioz ou Sartre. L’intégralité de ces documents est portée par une véhémence qui surprend, mais dont on comprend en même temps l’origine : l’irrationalité du mal. En effet, la blessure collective de la Shoah est intimement projetée chez Jankélévitch, qui affirme : « Je ressens l’obligation de prolonger en moi les souffrances qui m’ont été épargnées. » Le philosophe de la tempérance et de la justesse manifeste dans ses écrits une résistance catégorique et constante contre le fascisme, « ennemi héréditaire de toute pensée, quelle qu’elle soit. » L’obsédant souvenir du crime contre l’humanité alimentera sa pensée, parfois secondée par une vive émotion, tant la cruauté de l’offense se révèle impensable. L’impossibilité du pardon place le penseur des vertus, du sublime et de l’amour, face à des contradictions qui se traduisent par un déchirement dont il espéra jusqu’au bout trouver le remède.

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