Littérature française

Jean Teulé

Azincourt par temps de pluie

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Chronique de Murielle Gobert

Librairie Passerelles (Vienne)

Azincourt, 1415. L’armée française coupe la route aux Anglais qui tentent de traverser la Manche pour rentrer chez eux. Épuisés, faméliques, leur destin semble joué d'avance. Pas si sûr, comme nous le conte un Jean Teulé plus déchaîné que jamais !

 

Ce jeudi 24 octobre 1415, en pleine guerre de cent ans, les hommes des contingents français prennent leurs quartiers près du village d’Azincourt sous un déluge glacial. Tous ont hâte de se couvrir de gloire et de mettre en déroute l’armée anglaise, décimée par la famine et la maladie. On pourrait croire que le roman va suivre le cours normal d’une bataille historique, mais dès les premiers dialogues le ton est donné. L’arrivée de Charles d’Orléans sur le champ de bataille, déclamant des vers et prenant des airs de tendre rêveur, ouvre le bal. Bientôt, les aristocrates de la France entière vont débarquer à leur tour, chacun poussant l’autre pour être aux meilleures places (limitées !) dans la bataille. Les hommes recouverts de fer des pieds à la tête, chevaliers hyper équipés face à l’ennemi en haillons et pieds nus, discutent chiffon sous la pluie battante, en comparant leurs armures et la couleur des leurs épées. Confiants dans leur victoire, les soldats prennent du bon temps sous la flambée de grands feux de joie. Pourtant, une petite voix vient contrarier la bonne ambiance, celle de Fleur de Lys, la seule « ribaude » de ce champ de bataille, qui débusque les erreurs de stratégie et les négligences de l’armée l’air de rien, en jetant quelques phrases judicieuses que personne n’écoute, bien entendu. C'est là sans doute que Jean Teulé s'amuse le plus, en mettant en perspective la bêtise fatale de ces hommes trop sûrs d’eux et l’ambition aveugle et sourde de ces nantis imbus d’eux-mêmes, qui courent au désastre sans rien voir venir. Pour le lecteur, la jubilation va crescendo à la lecture de ce récit épique dont aucun détail ne lui est épargné. L'effroi se mêle sans répit au rire devant l’absurdité de ce désastre grandiose et parfaitement inutile !