Littérature étrangère

Arturo Pérez-Reverte

L’Italien

LS

✒ Laure Simoes

(Librairie Petites histoires entre amis, Chennevières-sur-Marne)

L’Italien est un roman d'aventures et de mer comme Arturo Pérez-Reverte sait si bien les inventer, où faits historiques et personnages fictifs nous emportent dans le monde fascinant des saboteurs sous-marins.

Gibraltar, 1942 : les Anglais occupent le port d'Algesiras, avec l'aide plus ou moins forcée des Espagnols, et se trouvent aux prises avec de mystérieux saboteurs italiens qui coulent leurs navires. Des années après, un journaliste espagnol retrace la vie de ces hommes de l’ombre prêts à braver tous les dangers parce que la guerre l’exige. Pérez-Reverte mène son roman à la façon d'une enquête qui interroge tous les protagonistes restés encore vivants mais il s’intéresse avant tout à une Espagnole, Elena Arbues, femme opaque et volontaire qui se joindra à eux. Il nous propose ainsi une belle brochette de caractères : des Anglais joueurs, un Espagnol aux mains salies par les besoins de la guerre, un amoureux fanatique des trains, un Italien au sourire éclatant, une libraire aux motivations obscures... Cela pourrait être léger mais la tragédie n'est jamais loin. Et la tension s'accentue au gré des périls qui s'accumulent. Qu’est-ce qu’un héros ? Quelles motivations nous poussent à risquer notre vie ? Autant de questions qui parcourent ce roman mené avec brio et qui contient tous les ingrédients d’un futur succès : danger, amour et soif de vivre ! Mais c'est surtout un magnifique portrait de femme, ambiguë, amoureuse et particulièrement humaine. Elena Arbues n'est qu'une simple libraire sans grand idéaux. Pourtant, le jeu des hasards et des rencontres la transforme profondément ou plutôt la révèle à elle-même, tandis que les hommes autour d'elle l'observent avec une admiration teintée d'angoisse. Arturo Pérez-Reverte investit ce passage méconnu de la Seconde Guerre mondiale avec force. Loin des romans critiques et dénonciateurs des horreurs de la guerre, il en fait un épisode de L’Illade où les héros acceptent la tragédie et la cruauté meurtrière des dieux, considérant leurs malheurs comme inhérents à la condition humaine.

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