Littérature française

David Foenkinos

La Famille Martin

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photo libraire

Chronique de Lydie Baillie

Librairie Aux lettres de mon moulin (Nîmes)

Et si la biographie d’inconnus devenait un roman°? Puisque toute vie est romanesque et que nous avons tous un double en soi, une face cachée à révéler. « Tout avenir est un roman à écrire », écrit David Foenkinos.

Quand un écrivain sombre devant la page blanche et que le seul espoir de renouer avec l’écriture est lié au hasard d’une rencontre. Parfois la vraie vie peut-être bien plus romanesque qu’une fiction. Alors qu’il est en panne d’inspiration, le narrateur, écrivain reconnu, se lance un défi : descendre en bas de son immeuble, s’adresser à la première personne qui passe et lui proposer de devenir le personnage principal de son prochain livre. Madeleine Tricot – un nom qu’il n’aurait pu imaginer pour une ancienne couturière –se réjouit à l’idée qu’elle puisse devenir le sujet d’un roman. Sa fille, Valérie, réticente face à cet inconnu qui s’est introduit chez la vieille dame, se montre rapidement convaincue par le projet littéraire, à condition que toute la famille Martin en fasse partie. Le romancier est pris en charge par ses personnages, comme dans une émission de réalité, il n’a plus qu’à attendre les rebondissements pour s’emparer de l’histoire. Madeleine, qui souffre d’un début d’Alzheimer, retrouve avec un enthousiasme heureux le souvenir de son premier amour. Alors que la vie de couple des Martin devient fade, Valérie ne voit pas d’un mauvais œil l’idée d’une aventure. Patrick, son mari, est désespéré face au constat sinistre de son quotidien. Quant aux ados, Lola et Jérémie, ils sont intrigués par ce délire d’écrivain qui investit leur quotidien. Une famille qui s’essouffle ; les passagers d’une même vie qui ne partagent plus rien ensemble. L’intrusion d’un étranger, comme un détonateur, va faire éclater l’armure qui loin de les protéger, n’aura fait que les murer dans un isolement douloureux. Le narrateur, comme un confident, va briser les silences, éclairer les non-dits, réveiller les sentiments. La banalité de l’intime va s’avérer romanesque. Le pouvoir de la littérature !

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