Littérature française

Christian Garcin

Selon Vincent

illustration
photo libraire

Chronique de Olivier Badoy

Librairie des Cordeliers (Romans-sur-Isère)

Dans les romans de Christian Garcin, « les passerelles entre les êtres et les choses abondent », une mythologie qui lui est propre se dessine, les réalités s’entrelacent et le lire devient une expérience unique. Un régal.

Cela fait bientôt vingt ans que Vincent n’a plus donné signe de vie et voilà qu’il réapparaît en envoyant un tapuscrit à son neveu Rosario, dont il était très proche. Il y fait le récit de sa lente mise à l’écart du monde et raconte comment, au fil des années et malgré les femmes qui l’accompagnent, il s’est retrouvé étranger à tout, jusqu’à devenir extérieur à lui-même : « Plus aucune lumière n’émanait de moi », dit-il. En proie à de violentes crises de paralysie, il consulte un garagiste chaman qui lui conseille de partir à la recherche de son « visage en miroir, à l’envers du monde ». Étrangement, Vincent associe à son récit le journal d’un jeune soldat napoléonien, Louis Folcher, écrit durant la campagne de Russie en 1812. Dès lors, les réalités se mêlent, c’est le début du voyage. Encouragé par sa mère et accompagné de son ami Paul, traducteur de Chen Wanglin, que les lecteurs de Christian Garcin connaissent bien, Rosario se met en tête de retrouver son oncle et la mystérieuse médaille de cuivre à l’effigie de Napoléon que ce dernier a dérobée. Il vivrait seul dans une cabane en Patagonie. Durant leur périple, les deux amis marchent sur les traces d’une ancienne expédition scientifique autour de laquelle se cristallise l’histoire. Ils auront pour compagnon un farfelu se disant propriétaire de Mars, Vénus et de la Lune, prêt à céder un hectare de ses biens pour trois dollars seulement. De cabanes en cabanes, le voyage se termine au bout du monde dans un paysage de désolation, à Isla Larga, où, derrière la dernière porte, reposent les confessions de Vincent. À la fois quête initiatique, récit de voyage et conte philosophique, ce texte témoigne de toute l’étendue du talent de Christian Garcin, qui, peu à peu, tisse une œuvre incontournable.