Essais

Baptiste Morizot

Raviver les braises du vivant

FZ

✒ Florence Zinck

(Librairie Sauramps Comédie, Montpellier)

Que sommes-nous ? Être humain ou être vivant ? Ce dualisme n’est qu’une impasse, répète inlassablement Baptiste Morizot. Après Manières d’être vivant (Actes Sud), cet enseignant-chercheur en philosophie prolonge sa réflexion avec ce nouvel essai, Raviver les braises du vivant, aux éditions Actes Sud.

 

 

Maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille, Baptiste Morizot propose une nouvelle anthropologie philosophique dont l’enjeu essentiel est de donner forme à la culture du vivant. À partir d’une étude de terrain réalisée en 2019 dans une forêt vosgienne redevenue foyer de libre évolution, sur l’initiative de l’association Vercors Vie Sauvage, sans exploitation humaine « extractive », il généralise et approfondit son propos pour dépasser des dualismes stériles qui rétrécissent les dimensions du vivant. Il s’agit de déconstruire ces préjugés mythiques qui étouffent le feu du vivant. En effet, Baptiste Morizot rejette l’opposition humain/nature et déconstruit « l’écopaternalisme » qui relègue la nature à un statut inférieur. Il bat en brèche l’idée que seul l’humain met en valeur la terre en l’exploitant, pour rendre toute sa valeur au vivant. Il a à cœur de définir au plus juste la dynamique du « réensauvagement » qui consiste à favoriser des écosystèmes autosuffisants en réduisant l’action humaine. Sans être antimoderne pour autant, il démontre que cette pratique est l’alliée d’une agriculture paysanne soutenable face à une agriculture productiviste. Enfin, l’auteur déplore que le vivant ne soit pas encore pensé comme notre identité la plus profonde. Ainsi, il est l'heure des « égards ajustés » avec le reste du vivant afin de raviver ses braises. Avec humilité, il nous engage à favoriser et revivifier les liens avec le monde du vivant. Ce qui n’est pas sans me rappeler un récit des Métamorphoses du poète antique Ovide, où Philémon et Baucis, s’aimant et vivant humblement, furent récompensés de leur « divine » hospitalité en devenant, à leur mort, un chêne et un tilleul enlacés au tronc commun.

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