Polar

Estelle Monbrun

Meurtre à Montaigne

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photo libraire

Chronique de Lionel Daubigney

Librairie Aux vents des mots (Gardanne)

Les manuscrits disparus ont été source d’inspiration pour de nombreux auteurs. Ici, un prétendu « Supplément » au Journal du voyage en Italie de Montaigne nous entraîne dans une intrigue fort bien enluminée.

Acte I : la découverte d’un corps au pied de la tour abritant la célèbre « librairie » du château de Montaigne : meurtre ou suicide ? Acte II : l’enlèvement, un mois plus tard, de deux fillettes sur une plage de l’île d’Oléron. Ce sont les petites-filles d’un ancien diplomate, considéré par beaucoup comme un spécialiste de l’œuvre de Michel de Montaigne. Son entregent politique lui permet d’obtenir le rappel du commissaire Foucheroux, retiré dans les Landes, pour diriger cette enquête. Mais les héros sont fatigués et c’est « un policier à la retraite, aux cheveux blanchissants, à l’énergie défaillante, au bord d’une grave dépression qu’il avait réussi pendant toutes ces années à ignorer mais qui maintenant le rattrapait, parce que ses enfants avaient quitté le nid et que sa femme s’était éloignée de lui » qui s’attaque à ce qui sera peut-être l’enquête la plus difficile de sa carrière. Même secondé (voire parfois précédé) par l’indéfectible et fidèle Leila Djimani, saura-t-il dénouer les fils d’une intrigue mêlant, entre autres, mystérieuse femme blonde et manuscrit à l’origine plus ou moins douteuse ? Une narration déstructurée permet à l’auteure de nous livrer les indices au compte-gouttes, de nous entraîner dans moult impasses et fausses pistes, et bien sûr de multiplier les coups de théâtre. Une nouvelle fois, Estelle Montbrun nous ravit par son sens du suspense, son art du dialogue, sa description tout en verve et en causticité d’un certain milieu universitaire, ainsi que les conseils délivrés par la directrice de collection d’une grande maison d’édition pour écrire un roman à succès : « Il nous faut de l’original et du violent. Modèle américain hard boil plutôt qu’anglais cosy, si vous voyez ce que je veux dire… (…) Et puis du sang que diable… Et bien sûr, du sexe… »