Littérature étrangère

Abraham Verghese

Le Pacte de l'eau

✒ Linda Pommereul

(Librairie Doucet, Le Mans)

Le Pacte de l’eau est un grand roman de femmes, de leur intimité et de leurs joies au-delà des épreuves de la vie. Une grande fresque, entre modernité et tradition, doublée d’une sublime traversée de l’Histoire de l’Inde mystérieuse.

Après l’inoubliable fresque, La Porte des larmes, Abraham Verghese nous offre Le Pacte de l’eau, un livre monde qui se déploie sur plusieurs décennies en explorant toutes les facettes de l’existence. L’auteur nous transporte dans la province du Kerala (d’où ses parents sont originaires), décor de cette somptueuse saga qui se déroule entre 1900 et 1970. Nous partageons la vie d’une famille keralaise dont le pilier est Big Ammachi, la matriarche du domaine de Parambil. Travancore, 1900. Une fillette de 12 ans orpheline de père, Mariama, est mariée par son oncle à un veuf de 40 ans, riche propriétaire terrien. Au fil du temps et des épreuves, elle comprend qu’une malédiction étrange rode sur sa belle-famille. À chaque génération au moins, une personne meurt noyée. D’ailleurs son époux préfère marcher plutôt que de prendre le bateau. Au cours de sa longue et incroyable vie, la fillette qui tremblait devant l’inconnu deviendra Big Ammachi, le pilier de sa communauté, et sera le témoin des transformations majeures de son pays. Outre le personnage de Marianna et d’une galerie de personnages qui animent ce roman, nous sillonnons en compagnie de Digby, un jeune médecin écossais qui rêve de devenir chirurgien mais qui rejoint le service médical indien en pleine période coloniale, lui aussi plein de projets et de passion. Le talent de l’auteur se déploie dans la peinture de cette nature luxuriante et nourricière, omniprésente car le roman s’adresse avant tout à la terre et aux vies qu’elles abritent. Abraham Verghese relie les existences dans un entrelacs de rituels, d’un quotidien traversé par les événements historiques, des guerres à l’indépendance du pays en passant par la révolution naxalite. Au final, un texte au souffle et au charme incroyables où Abraham Verghese nous ouvre les fenêtres d’un monde en mouvement.

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