Littérature française

Mathieu Larnaudie

Notre désir est sans remède

photo libraire

Chronique de Vincent Ladoucette

Librairie Privat (Toulouse)

Trois ans après s’être attaqué au discours politique (Acharnement, Actes Sud), Mathieu Larnaudie dresse le portrait d’une actrice au destin tragique, étoile filante de l’Amérique des années 1930.

Au moment où sa renommée aurait pu lui permettre d’entrer dans la légende, Frances Farmer, devenue comédienne grâce à son inflexible détermination, quitta brièvement les studios de cinéma pour aller jouer dans des pièces de théâtre à Broadway. Là où Hollywood, et peut-être même toute la société américaine, voulait qu’elle ne fût qu’une icône et un corps en mouvement, Frances agissait en femme résolument libre, non malléable et donc dangereuse. À cause de ses frasques et de son insoumission, elle fut brisée, à défaut d’être domptée. Progressant à l’écart du récit linéaire, déployant son écriture magnifique avec une maîtrise exceptionnelle, l’auteur balaie plusieurs périodes de son regard acéré, raconte en un chapitre époustouflant la naissance du cinéma comme bras armé de l’idéologie américaine et inclut brillamment l’histoire d’une actrice rebelle dans l’Histoire d’une nation décidée à écraser toute forme de révolte contre les institutions. À l’instar d’Alban Lefranc, Mathieu Larnaudie fait indubitablement partie de cette avant-garde talentueuse qui, loin des projecteurs, assure patiemment l’avenir d’une littérature française intelligente et résolument politique.

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