Littérature étrangère

Denis Johnson

Les Monstres qui ricanent

photo libraire

Chronique de Gwendoline Touchard

Bibliothèque/Médiathèque Trapèze (Boulogne-Billancourt)

Après plusieurs années de silence, Denis Johnson revient en grande forme et nous livre un roman d’espionnage paranoïaque et halluciné, où la loi des frontières terrestres et mentales implose sous le poids des mensonges.

La trame de ce texte est simple : Nair, agent double travaillant pour l’OTAN, doit enquêter sur un ancien ami, Mickael Adriko, agent trouble et grand séducteur accompagné de sa future femme Davidia St Claire, dont Nair va tomber amoureux. Mais il y a quelque chose chez Denis Johnson, cet art de flouter les contours, qui donne à son œuvre une ampleur incroyable, que l’on avait déjà retrouvé dans le magnifique Jesus’ Son (Christian Bourgois), ou dans Arbre de fumée (10/18). Il y décrit un paysage africain aux frontières incertaines, terrain parfait pour son art. Car le paysage n’est que le reflet de ses personnages : barbouillés, déchus, perdus dans leur propre inconsistance et leur réalité alternative. Il y a des airs de John Le Carré dans ce texte, mais aussi des échos à la prose de William Burroughs, pour l’évocation de cette longue agonie terrestre où se mêlent illusions d’optiques et fragmentations du réel à la puissante féerie de la paranoïa.

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