Littérature française

Grégoire Domenach

Refuge au crépuscule

CJ

✒ Catherine Jamain

(Librairie des thés, Surgères)

Après son très remarqué Entre la source et l’estuaire (Le Dilettante et le Livre de Poche), prix Marcel-Aymé, Grégoire Domenach nous entraîne pour un voyage dépaysant au cœur de l’Asie centrale et de nous-mêmes.

Le hasard fait se rencontrer Gaspard Dernaisse, jeune photographe français, Arstan Isaev, Kirghize souffrant d’un cancer qui aimerait un livre de photographies sur son pays à transmettre à l’amour de sa vie, et Barza, son ami français vivant depuis des années au Kirghizstan et qui servira de guide à Gaspard. Ces deux-là vont apprendre à se connaître, à découvrir qui ils sont et ce qu’ils veulent. Le vieil Arstan amène Gaspard à réfléchir sur le sens donné à la vie. « Si nous ne sommes pas capables, en tant qu’êtres humains, de nous opposer au massacre de ce qu’il y a de plus vulnérable, alors nous sommes condamnés à perdre toute dignité. » Tel le poisson rémora qui s’accroche au requin pour leur bénéfice commun, l’humain gagne à côtoyer ses semblables, sans vanité. Il y a beaucoup d'humanité dans ces personnages rudes, comme dans les paysages qu'ils traversent. Dans ce Refuge au crépuscule, on parle de l’ex-Union soviétique, d’amour inconditionnel, de passé douloureux, de rédemption, d’exil volontaire, de quête de sens et puis de la nature, grandiose, du Kirghizstan au Kazakhstan, des chevaux, des yourtes, des steppes, des montagnes et, enfin, de la vodka qui relie les hommes, toujours ! Grégoire Domenach a séjourné plusieurs années en Asie centrale et il sait à merveille nous immerger dans la culture et les traditions locales. L’effet est rendu encore plus efficace avec l’utilisation, mesurée, de mots kirghizes. L’évasion est garantie. Voilà un texte que je vous invite à lire lentement pour en savourer toute la substance, la beauté de la langue et l’intelligence de l’histoire. Vous goutterez bien un borsok avec du miel (beignet frit) accompagné d’un kourout bien sec (fromage de brebis) et arrosé d’un verre de samagon (eau de vie). En route pour l’aventure vers le grand Est !

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