Bande dessinée

Matthieu Blanchin , Christian Perrissin

Martha Jane Cannary (3/3)

illustration
photo libraire

Chronique de Enrica Foures

Librairie Lafolye & La Sadel (Vannes)

Le 1er mai 1852 naissait celle qui allait devenir une légende de l’Ouest. Comblant les blancs de l’histoire, Blanchin et Perrissin laissent libre cours à leur imagination pour se plonger dans le mythique Wild West. Plus qu’un western, leur triptyque est avant tout un portrait de femme qui voulait être libre dans un univers masculin.

Martha Jane Cannary, plus connue sous le nom de Calamity Jane, allait vivre cinquante et une années d’une existence trépidante, réelle ou fabulée dont il nous reste quelques traces : pour l’essentiel sous la forme de photographies et de lettres – regroupées dans un recueil paru en français sous le titre Lettres à sa fille –, témoignages passionnés où se mêlent réalité, fantasme et souvenirs tronqués ou arrangés. Calamity Jane avait déjà contribué à faire de sa vie une légende en racontant ses exploits à des publics conquis. Les anecdotes relatées par d’autres ont fait le reste. Multipliant les expériences et les petits boulots, elle se forge, années après années, une réputation de femme de caractère, aussi fougueuse que ses fameux camarades du sexe opposé. Chiquant et buvant comme un homme, se faisant passer pour l’un des leurs si nécessaire, Martha Jane alimente conversations, chroniques journalistiques et rumeurs. Alcoolique et analphabète pour les uns, héroïne flamboyante pour les autres, sa réputation s’est aussi bâtie sur le caractère controversé du personnage. Le récit de Perrissin et le dessin à la fois nerveux et touchant de Blanchin lui redonnent vie. Elle naît dans le Missouri, et s’installe quelques années plus tard, en 1865, à Salt Lake City dans la plus grande communauté mormone de l’Ouest. Elle perd sa mère pendant le voyage et son père décède trois ans plus tard. S’enfuyant pour éviter un mariage qu’elle refuse, elle commence alors sa « vie aventureuse » et pose les fondations de sa légende. Engagée par les généraux Custer et Crook dans la guerre contre les Amérindiens, elle brille par ses actes de bravoure. En 1875, elle rencontre Wild Bill Hickock, qui deviendra son mari et le père de sa fille Janey, à qui elle a consacré les fameuse Lettres à sa fille. À la mort de celui-ci en 1876, elle commence à enchaîner divers petits boulots, passant de conductrice de char à bœufs à cuisinière, d’infirmière lors d’une épidémie de variole à lingère dans les bordels de son amie Dora DuFran et, après un passage dans le Wild West Show de Tom Hardwick, elle termine ses jours à Terry où elle meurt en 1903. Elle est inhumée à Deadwood, à côté de son ami Wild Bill Hickock. De son enfance dans le Missouri à sa mort dans le Dakota, on suit son destin hors normes de femme rebelle. Réalité et fiction se confondent pour donner un récit haletant et crédible, aux tons sépia. La Martha Jane Cannary de Blanchin et Perrissin, s’il n’est pas réel est un personnage réaliste : indépendante, courageuse et déterminée, bien que sentimentale, elle est aussi présentée comme une femme pleine de fêlures, caractérielle et alcoolique. La suite et fin paraissant, on est presque triste de la quitter, de faire nos adieux à l’indomptable Calamity Jane…

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