Littérature française

Pascal Garnier

Cartons

illustration
photo libraire

Chronique de Catherine Le Duff

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Faire ses cartons pour un déménagement, quoi de plus banal ? Et ne pas les défaire lors de l’emménagement, quoi de moins normal ? Le paradoxe au cœur, Pascal Garnier s’attache à dévoiler les restes épars de ses ultimes cartons.

Brice est illustrateur, Emma journaliste, ils se sont rencontrés lors de l’exposition d’un peintre hongrois dont la spécialité est de fossiliser le goulasch au vernis, puis ils se sont aimés. Aujourd’hui, Brice débarque dans cette grande bâtisse de campagne nouvellement leur. Il débarque seul, entouré de caisses qu’il éventre peu à peu pour tromper l’ennui et échapper à la réalité. Il rencontre Martine, coiffeuse, qui a « cet âge où le sucre de la femme devient miel », et Blanche, Blanche surtout, « mariée restée trop longtemps en vitrine ». Nait une amitié diaphane, nourrie au Viandox, au Télé achat et au récit de leurs souvenirs destructeurs. Ils fuient leurs démons, mais peut-on jamais leur échapper ? L’amour est balayé, la famille ravagée, les espérances clouées au sol par des nuits longues comme des dimanches que l’on ne compte plus. Quand de l’absurde dépend la survie et des cauchemars la sensation d’exister, l’on est une présence aussi brute que brutale. Noircies d’un humour corrosif, les existences simples de Pascal Garnier plongent, se rongent à l’ultime : « La vie leur tombe des mains », sans se départir d’un sourire édenté. Un roman que l’on dévore, au risque d’avaler de travers.