Une énigmatique narratrice est arrêtée après avoir frappé un homme à coups de bouteille de vin.

Loin d’être le cœur du récit, son arrestation est l’occasion pour elle de réfléchir sur son métier : d’origine étrangère, le simple fait de pouvoir demeurer légalement sur le territoire français en fait une vendue aux yeux de ceux, étrangers en détresse, dont elle est chargée de traduire les propos. Tiraillée, elle s’use à décrire des hommes abîmés par l’attente, au creux des barres d’immeubles, entre les gris bétonnés de la ville et les gares délabrées. Ses souvenirs d’enfance, épars, multicolores, douloureux, s’associent à ceux de son métier. Certains prennent des allures rocambolesques au gré des récits des demandeurs d’asile, et souvent sont plombés par son impuissance : « On amenait ces gens-là à dire la vérité pour en fin de compte n’en rien faire. » Si les descriptions de l’auteur rendent compte du malheur de ses personnages, sa poésie, unique échappatoire, supplante les frustrations et balaye la violence. Un texte évidemment politique, résolument poétique, profondément humain.