Bande dessinée

Antonio Altarriba , Keko

Moi, assassin

illustration
photo libraire

Chronique de Noémie Vérot

Librairie Rive gauche (Lyon)

Après L’Art de voler et L’Art de tuer, la nouvelle bande dessinée assassine d’Antonio Altarriba est un régal ! Un délire inhumain et parfaitement crédible sur le crime comme œuvre d’art. Une bande dessinée magistrale et maîtrisée, tant sur le plan scénaristique qu’esthétique.

 

Tout le monde se souvient de l’exceptionnel L’Art de voler d’Antonio Altarriba, un roman graphique sur le suicide de son père après la guerre d’Espagne. L’auteur revient avec un scénario virtuose sur la vie d’un professeur des beaux-arts dans une université du Pays basque. Enrique Ramirez est brillant, spécialiste de « l’art et la cruauté dans la peinture » et reconnu dans le monde entier. Mais il profite de ses congrès un peu partout à l’étranger pour commettre des crimes qu’il considère comme l’aboutissement de son travail. Ses crimes sont esthétiques, parce qu’ils sont gratuits, sans justifications politique ou religieuse, parce qu’il n’en tire aucun bénéfice et qu’ils ne sont motivés par rien. Le véritable assassin est un artiste. Il travaille la matière, la vie. Il crée en donnant la mort. Altarriba parvient à nous convaincre que couper le fil de la vie est le plus beau spectacle du monde, grâce au travail fantastique de Keko et de ses aplats noirs et blancs aux contrastes tranchants. Un véritable choc visuel, où seule la couleur rouge sang dégouline au fil des pages. Keko se réfère tout au long de l’album à certaines toiles de Goya, Delvaux, Bacon ou Munch, ce qui donne une densité, une beauté et une noirceur fascinante à l’histoire