Littérature française

Laurent Gaudé

Salina

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photo libraire

Chronique de Guillaume Foussard

Librairie Le Méandre (Meudon)

Laurent Gaudé a cette force d’écriture qui lui permet de naviguer entre poésie, théâtre et roman. Cet automne, les lecteurs vont pouvoir se délecter de Salina, petit bijou d’écriture issu de l’adaptation de la pièce de théâtre du même nom parue en 2003 aux éditions Actes Sud.

Son fils la sent faible : Salina n’est plus qu’un corps décharné et fatigué. La fin est proche. Malaka se doit de trouver une terre pour que repose en paix la dépouille et l’âme de sa mère. Mais où enterrer une femme qui a fini sa vie en nomade dans le désert ? À force d’errances, au-delà de la montagne Tadma, Malaka va trouver la mystérieuse île-cimetière. Mais pour que ses portes s’ouvrent, il va devoir raconter la vie de Salina sans rien n’omettre ni transformer. Salina, c’est d’abord un cri perçant dans l’étendue aride du désert. Un bébé enturbanné déposé par un mystérieux cavalier aux portes du clan Djimba, à la merci du soleil plombant et des hyènes affamées. Les anciens flairent la malédiction, un nouveau-né abandonné ne peut être que le fruit d’un malheur à venir. C’est l’instinct maternel de Mamambala qui sauvera une première fois Salina d’une mort promise. Le plus dur reste pourtant à vivre pour la jeune Salina qui va grandir comme un corps étranger dans la tribu Djimba. Amoureuse de Kano, elle sera mariée de force à son frère aîné, le violent et pervers Saro. À la mort de ce dernier, Salina sera définitivement chassée du clan et vouée à un exil forcé dans la rudesse du désert. Salina se lit comme une tragédie, où les sentiments de haine, d’amour filial et de vengeance forment un texte d’une richesse rare. Comment ne pas y voir au-delà des symboles un texte d’actualité qui rend hommage aux exclus, aux exilés et à la force des femmes ? Car Salina est cette exilée qui sans cesse doit trouver les ressources pour ne pas abdiquer et se réinventer un avenir.