Jeunesse

Florence Aubry

Le Royaume des cercueils suspendus

illustration
photo libraire

Chronique de Amélie Ranchin

Librairie Le Jardin des lettres (Craponne)

Le peuple Bâa est pacifique. Il vit en autarcie dans une vallée verdoyante et mène une existence paisible et idyllique.

Il existe toutefois certaines conditions à la préservation de cette douce plénitude : le respect des règles et des traditions de la communauté. Les rituels sont très importants et celui de la Cérémonie plus particulièrement. Xiong et Huang, deux jeunes hommes amis depuis toujours, vont enfin participer à ce rite, lors duquel une incision est faite dans le dos des garçons pour laisser apparaître le Don, deux larges et fines ailes servant principalement à la guerre, qui marque le passage à l’âge adulte. Mais ce soir-là, le silence se fait autour de Huang, car, pour la première fois, un jeune n’a pas le Don. La communauté est confrontée à un intrus et se sent trahie, la sentence doit être exceptionnelle : Huang est condamné à mort. Il sera porté, vivant, en haut de la falaise, là où le peuple des Bâas suspend les cercueils des défunts en offrande aux dieux, et il devra attendre la mort, sans eau ni nourriture. Huang est pourtant un jeune homme apprécié et cette condamnation laisse un goût amer aux habitants de la vallée. Chûû, le père de Huang, est rongé par la culpabilité d’avoir adopté dans le plus grand secret un nourrisson issu d’un autre peuple, et Leï, la promise de Huang, ne peut pas envisager l’avenir sans lui. Si l’amour indéfectible de la jeune femme illumine ce beau roman, Xiong, ami d’enfance de Huang, amène un côté plus sombre au récit en vouant une haine nouvelle et tenace au jeune condamné depuis que ce dernier l’a blessé au cours d’une bagarre et fait de lui un jaddée, « un homme tenu à l’écart de la guerre ». L’auteure livre ici une histoire passionnante, portée par une écriture forte et précise, parfois elliptique mais toujours cohérente, au cœur des passions tellement humaines du peuple Bâa.