Littérature étrangère
Pinar Selek
La Maison du Bosphore
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Pinar Selek
La Maison du Bosphore
Traduit du turc par Sibel Kerem
Liana Levi
05/04/2013
320 pages, 21 €
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Chronique de
Isabelle Leclerc
Librairie L'Imagigraphe (Paris) -
❤ Lu et conseillé par
7 libraire(s)
- Geneviève Gimeno de Maupetit (Marseille)
- Aurélie Paschal
- Dominique Paschal
- Linda Pommereul de Doucet (Le Mans)
- Valérie Barbe de Au brouillon de culture (Caen)
- Sarah Gastel de Adrienne (Lyon)
- Valérie Ohanian de Masséna (Nice)
✒ Isabelle Leclerc
(Librairie L'Imagigraphe, Paris)
Pinar Selek, jeune femme turque engagée qui milite pour le droit des femmes et des minorités, et lutte pour la démocratie, exprime ses révoltes à travers l’écriture. Notamment dans ce premier roman très maîtrisé.
L’histoire commence en octobre 1980. Quatre adolescents d’Istanbul rêvent leur avenir dans une Turquie soumise à la dictature. Elif la révoltée se tourne vers l’engagement politique clandestin, abandonnant derrière elle son identité et tous ceux qui lui sont chers. Son ami Hasan, quant à lui, part étudier la musique à Paris et découvre le plaisir du voyage grâce à l’amitié d’un autre musicien, Rafi. Séma voudrait rentrer à l’université, elle espère une vie meilleure et plus libre, elle rêve d’émancipation et de fuir le quartier populaire de Yedikule où elle a grandi. Salih, son amoureux, apprenti menuisier, veut édifier une nouvelle Turquie, en commençant par le quartier qu’il habite. Pour ne pas se contenter de survivre et de crever, les quatre personnages cherchent à donner un sens à leur vie. Ils se cherchent, se séparent, se retrouvent. L’auteure les décrit dans leur milieu familial, parmi leurs amis et leurs connaissances, à l’intérieur de leur quartier. C’est une autre façon d’arpenter Istanbul, d’en découvrir les différentes communautés, les populations interlopes, les prostituées et les mendiants. Istanbul évolue à une vitesse folle, les quartiers, les paysages, les habitants changent, pas toujours pour le meilleur. Pinar Selek sait remarquablement décrire les atmosphères et la vie sociale très riche du Bosphore, raconter les révoltes du quotidien, peindre les gestes d’amitié, de solidarité, d’attention aux autres, les joies et les chagrins partagés, la peur parfois… Il se dégage de ces pages une intense chaleur humaine. La Maison du Bosphore, sorte d’utopie dans laquelle ceux qui vivent en marge de la société totalitaire turque des années 1980 peuvent se retrouver, est une réflexion sur l’appartenance, où l’amour et l’amitié deviennent des instruments de lutte contre l’obscurantisme et la violence.